Pari tenu: le flamboyant président vénézuélien a remporté, triomphalement, un scrutin qui ne pouvait lui échapper. 61,35% des suffrages exprimés pour le président sortant, Hugo Chavez, contre 38,39% à un adversaire social-démocrate, Manuel Rosalès, a annoncé d'une voix solennelle à la télévision, Tibisay Lucena, présidente du Conseil national électoral. Douzième scrutin, douzième victoire, la plus éclatante, sans aucun doute. Avec ce large et solide succès, Hugo Chavez consolide non seulement son ancrage au sein de la population vénézuélienne, mais aura aussi, à n'en pas douter, les coudées franches pour appliquer son programme de développement économique. Son regard acéré s'est, à nouveau, focalisé sur son ennemi juré, l'Amérique, et de sa voix de tribun exceptionnelle, il s'exclame et fait rappeler à qui veut l'entendre: «Nous avons donné une leçon à l'impérialisme américain. C'est une autre défaite pour le diable qui prétend diriger l'impérialisme américain.» G.W.Bush, un ennemi héréditaire? L'homme qui ne cesse de défier l'hégémonie américaine a la dent dure envers l'Administration Bush, qu'il a traité de diable en septembre 2006, dans l'enceinte de l'Organisation des Nations unies. Il faut dire qu'il n'a jamais hésité à se démarquer des positions plutôt tièdes, mi-figue mi-raisin, des nations réputées progressistes, quand il s'est agi de condamner les politiques agressives des USA ou d'Israël. Pour preuve, le soutien apporté à l'Iran dans le conflit du nucléaire qui oppose ce dernier aux pays occidentaux, à leur tête les Etats-Unis, le rappel de son ambassadeur de Tel-Aviv, lors de la guerre d'Israël contre le Liban. Il fut aussi le premier pays à réduire sa production de pétrole pour enrayer la chute du prix du baril, dans le cadre d'une décision commune des pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole. «Je suis le peuple vénézuélien», s'est écrié Hugo Chavez comme pour marquer sa profonde communion avec ceux qui l'ont, une seconde fois, triomphalement porté à la magistrature suprême. Une identification totale à son peuple qui la lui rend bien. C'est une lune de miel qui dure et qui risque de s'éterniser. C'est qu'il a averti l'opposition qu'elle ne retournerait plus jamais aux destinées du Venezuela, un pouvoir qu'il compte exercer jusqu'en 2021, date symbole de l'une des plus grandes batailles livrées contre la Couronne d'Espagne, dont on fêtera le bicentenaire. Haï par les élites de son pays, mais soutenu par la majorité des Vénézuéliens de condition modeste, Hugo Chavez, a fait face à une fronde sans précédent en avril 2002, un putsch mené par le patronat qui l'a écarté du pouvoir pour... deux jours seulement. Grâce à la vingtaine de «missions» initiées pour porter des programmes, sociaux d'envergure en faveur des couches les plus défavorisées des quartiers les plus démunis, le président sortant s'est assuré le soutien d'un électorat indispensable à la mise en place d'un plan de relance économique doté de 65 milliards de dollars. Fort d'une manne pétrolière de 85 milliards de dollars engrangée l'année précédente, le Venezuela, cinquième pays exportateur de pétrole au monde, possèderait les plus importantes réserves mondiales, 315 milliards de barils. Paradoxalement, premier fournisseur des USA, son ennemi juré, il dispose de quelque 14.000 stations d'essence sur l'ensemble du territoire américain. Il s'impose comme un partenaire indispensable à l'économie des Etats-Unis. Symbole de la renaissance glorieuse du soleil, le Condor plane au-dessus du Venezuela, à sa tête Hugo Chavez.