Quand on mélange la chorba à la sauce politique, on risque de se brûler la langue et la carrière politique avec. La campagne électorale bat son plein. Au fur et à mesure de l'avancée inexorable vers sa fin, elle se vide de sa substance et suscite un désintérêt croissant. Les leaders des partis voyagent et sillonnent le pays pour prêcher la bonne parole. Les citoyens qui se rendent aux meetings assistent, le temps d'un discours, à des exercices de style en matière de communication. Les uns promettent monts et merveilles pour charmer l'auditoire, les autres s'adonnent à une véritable chasse aux voix en prévision du rendez-vous du 17 mai prochain, en développant une attitude à la limite du tolérable. La misère du peuple est mise en exergue pour mieux faire passer un message précis auprès de l'assistance et des téléspectateurs qui osent suivre le défilé des figures partisanes, appelées à être les futurs députés, sur le petit écran; votez pour moi et pas pour l'autre. Usant de méthodes archaïques en matière de communication, vieilles pratiques des années 70, la majorité des orateurs et conférenciers obnubilés par le siège de député qu'ils convoitent, se laissent aller et dévoilent leur vraie nature. C'est le cas, par exemple, du Docteur Hadef, le patron du Parti de l'Espoir, qui s'est fait une grande réputation de politologue exerçant son talent pendant des années sur les colonnes de la presse nationale, avant de passer à l'étape supérieure. La création d'un parti politique. A l'écouter, on reste stupéfait. Il parle aux citoyens avec un langage incompréhensible. Il promet tout. Il dit même qu'il ne va pas aller à l'APN pour manger une chorba, comme si nos ex-députés se tapaient de la chorba. Le Docteur Hadef oublie-t-il que la chorba est un plat populaire? Quand on mélange la chorba à la sauce politique, on risque de se brûler la langue et la carrière politique avec. Il n'est pas le seul dans la catégorie. Les Zeghdoud, Merbah, Bouacha et les autres chefs des «sanafirs» nous servent des discours à la carte. Pour rêver, il suffit d'aller à l'un des meetings qu'ils animent. Peu de monde et beaucoup de promesses. Les logements, les postes de travail, le Smig à plus de trente mille dinars, les terres agricoles, les voyages, la santé, le bonheur sont promis à tous ceux qui donneront une voix. Un bulletin de vote. Du coup, on se surprend à regretter les shows présentés par un certain Ahmed Bencherif du Pnsd, à l'occasion des législatives avortées de 1991. Lui, au moins, il faisait rire les Algériens dans des moments de grandes tensions annonciatrices d'une grande tragédie nationale. Ce Monsieur est resté dans l'imaginaire populaire comme le maître des tribuns des temps modernes. N'a t-il pas promis aux gens du Sud algérien, de manger des crevettes dans la mer intérieure qu'il projetait de mettre au point pour faire mieux que le lac artificiel du chef d'Etat voisin, Mouamar El Gueddafi. Nos candidats abusent du virtuel pour présenter des projets à trois dimensions. Les Algériens s ‘amusent comme des fous en écoutant les belles paroles de ceux qui prétendent avoir la clé du bonheur. Savent-ils au moins qu'ils ne peuvent pas se substituer à l'Exécutif? Certains vont même jusqu'à placer la balle plus haut que l'objectif tracé par le président de le République en promettant plus de 1 million de logements. Heureusement que les citoyens ne sont pas obligés d'aller aux meetings. Dieu soit loué, puisqu'il suffit d'appuyer sur le remote control ou de passer le seuil de la porte de la maison pour changer d'univers. Pour revenir à la réalité locale ou d'outre-mer. Cette campagne électorale culbute dans la routine. Nos politiques ne suivent pas l'évolution sociale des citoyens qui paraissent parfois plus conscients des enjeux électoraux prévus que bon nombre de ceux qui postulent pour un strapontin et un grand salaire. Le peuple demande la restauration totale de la paix. L'éradication de la corruption, de la hogra, et du partage équitable des richesses nationales sous le règne d'un Etat souverain. Les Algériens n'ont peut-être pas la classe politique qu'ils méritent.