Le moment est-il venu pour l'Afrique de profiter des rivalités entre les puissants de ce monde? L'Algérie participe au Sommet du G8 qui se tient ce mercredi à Heiligendamm (nord de l'Allemagne). La contribution du président Abdelaziz Bouteflika à la rencontre des huit pays les plus riches intervient sur deux niveaux: la place et l'ambition de l'Algérie et le rapport à l'Afrique. Dans le premier thème, le président algérien fera le point de la situation des réformes politiques, institutionnelles et économiques engagées par le pays depuis 1999. Le but étant de convaincre les pays riches et industrialisés que sont ceux du G8, de l'engagement irréversible de l'Algérie dans la voie de la modernité et de la démocratie. En ce sens, les puissances du monde occidental seront attentives au rapport que présentera le chef de l'Etat sur les avancées dans le domaine des droits de l'homme et des libertés. Ici, il faut rappeler le précédent plaidoyer de Abdelaziz Bouteflika devant ce même G8, en juin 2004, en Georgie, lorsqu'il avait détaillé les réformes engagées dans le pays dans les domaines de l'éducation nationale, les droits de la femme, la justice, les institutions...Et qu'il fût applaudi. En Allemagne, il va falloir convaincre surtout, quels que soient les progrès enregistrés depuis 2004, de l'essentiel: le maintien du cap sur les réformes. En marge du Sommet, le chef de l'Etat visitera le Forum économique germano-arabe qui se tient à cette occasion, et auquel l'Algérie participe avec nombre d'entreprises privées et publiques. La proximité de ces deux événements, le politique et l'économique, indique que la participation de M.Bouteflika à ce Sommet ne se résumera pas à une simple présence d'ordre protocolaire. Sur le second thème à l'ordre du jour de ce Sommet, l'Algérie, au même titre que les cofondateurs du Nouveau plan de développement de l'Afrique (Nepad), invités à ce Sommet et qui sont les chefs d'Etat de l'Afrique du Sud, du Sénégal, du Ghana, du Nigeria, de l'Egypte et du Libéria, rappellera aux membres du G8, leurs engagements pour le co- développement. A commencer par l'échange commercial pour lequel, paradoxalement, les Occidentaux n'appliquent guère la clause des nations favorisées. Autrement dit, l'accès des produits africains, encore soumis aux taxes et fiscalités douanières. Il est vrai que les puissances occidentales estiment que cette question doit être clarifiée au sein de l'OMC, mais il est vrai aussi qu'au sein de cette même OMC, ce sont eux et principalement les USA qui font obstacle. Dans ce contexte, le rôle des institutions financières internationales reviendra au premier plan, à commencer par celui de la Banque mondiale, qui loin de favoriser les aides et prêts, bénéficie, au contraire, des profits sur les taux d'intérêt. Ces dernières années, la Banque mondiale, de concert avec le FMI, a réduit considérablement les budgets sociaux et soutenu une concurrence déloyale des multinationales face aux producteurs africains. Avec un taux de croissance de 5,6% pour l'année 2006-2007 et de 5,7% annoncé pour 2008, l'Afrique est devenue plus un continent candidat à l'usure (pour des raisons de gouvernance propre à l'Afrique aussi) qu'une espérance de développement. C'est aussi la raison par exemple, pour laquelle les pays d'Amérique du Sud, comme le Venezuela, le Brésil, le Pérou, la Bolivie...sont en train de lancer une banque de développement régionale, pour échapper, voire sortir définitivement, de la Banque mondiale. Ainsi, la présence du chef de l'Etat algérien à ce Sommet ne sera pas de tout repos. Une question subsiste cependant: l'affrontement entre Russes, Américains, et Européens sur des questions stratégiques telles celles relatives au bouclier antimissile, à l'avenir du Kosovo, l'environnement...laissera-t-il le temps aux représentants de l'Afrique de plaider les questions urgentes qu'elle vit? Peut-être le moment est-il venu pour l'Afrique de profiter des rivalités entre les puissants de ce monde pour nouer des alliances et des stratégies à son profit. Pour toutes ces raisons, le Sommet du G8 de ce mercredi, mettra en évidence, un peu plus ce que veulent les riches face aux pauvres.