Le plus inquiétant dans la stratégie du Gspc-Aqmi est cette propension à recruter des éléments de plus en plus jeunes. L'information faisant état de treize mineurs arrêtés dans la région de Boumerdès lors du démantèlement d'un camp suspecté de servir à l'entraînement de l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), alimente les plus sérieuses craintes. Les premières indications affirment que les zones touchées par ce ralliement de jeunes sont comprises entre Tizi Ouzou à l'est et Boumerdès à l'ouest, et concernent des villages situés dans les contreforts est de Boumerdès. Selon les mêmes sources, les treize mineurs, qui sont âgés de 12 à 17 ans dont 10 d'entre eux sont des collégiens, ont été arrêtés dans le cadre d'une enquête qui a duré deux mois. Selon des responsables de la police de Boumerdès, l'enquête a pris sa source au lendemain des informations indiquant que quinze jeunes, dont des adolescents, ont quitté leur village, à Sahel Boubrak, pour regagner les maquis du Gspc-Aqmi. Les émirs locaux du Gspc, mouvement qui s'est rebaptisé branche d'Al Qaïda au Maghreb islamique, recrutaient des adolescents pour leur apprendre à combattre dans un camp d'endoctrinement sur les monts de Thénia, près de Boumerdès. Ces adolescents ont participé à plusieurs actions terroristes en fournissant aux chefs de cette organisation des informations sur le mouvement des forces de sécurité dans les maquis islamistes de la région, toujours selon les mêmes sources sécuritaires. Des téléphones portables, des CD sur les activités de l'ex-Gspc et du réseau terroriste international Al Qaîda d'Oussama Ben Laden ont été saisis lors des perquisitions dans les domiciles des suspects arrêtés. Le plus inquiétant dans la stratégie du Gspc-Aqmi est cette propension à recruter des éléments de plus en plus jeunes. Les attentats du 11/4 semblent être beaucoup plus indicateurs sur les nouvelles stratégies et les modes opératoires qu'elles n'ont en l'air. En effet, ils ont été opérés au coeur de la capitale, à l'épicentre de la sécurité, en plein jour, et ciblant des édifices-symboles et de sécurité. Les photos des trois kamikazes, qui se sont fait sauter avec des charges de 500 à 700kg de mélanges explosifs confirment qu'il s'agit de jeunes terroristes de la troisième génération. Celui qui a perpétré l'attentat, le plus important, non pas uniquement du 11 avril, mais aussi depuis le début du terrorisme en Algérie, est un jeune garçon à peine sorti de l'enfance, si l'on se réfère à sa silhouette, bien qu'il soit agé de 28 ans. Avec son survêtement de sport bleu, son visage glabre et son air de jeune branché, il peut se promener partout sans éveiller le moindre soupçon. La troisième génération des djihadistes que nous avons en face, aujourd'hui, est celle des jeunes, âgés aujourd'hui entre 17 et 25 ans et qui est tentée par l'action terroriste. Au plan idéologique, elle est endoctrinée à outrance, mais sans posséder une culture islamique sérieuse, elle reste, toutefois, portée, premièrement et avant tout, sur l'action spectaculaire de préférence, depuis les attaques du 11 septembre 2001 au moins. Il s'agit, aussi, suivant l'avis de l'une des meilleures spécialistes du terrorisme actuellement, Anne Giudicelli, d'une nouvelle forme d'adaptation aux dispositifs de contrôle/lutte antiterroriste, qui consiste à recourir à des individus qui ne sont pas intégrés dans les critères de surveillance (on le voit par exemple dans les réseaux de drogue) et qui sont plus fragiles. Ceux qui sont partis en Irak, ont appris, sur place, comment se faire sauter devant les forces de sécurité et devant des édifices de l'Etat. Ils en sont revenus imprégnés de cette action qui permet au jeune candidat à l'attentat suicide (un acte de foi, dans les fetwas en usage dans les milieux djihadistes les plus radicaux) de faire trembler les puissants. Un colonel de l'Armée nationale, opérant des ratissages militaires dans une zone du Gspc, nous faisait part, récemment, de ses soucis: «Nous sommes en face de jeunes garçons, fraîchement élus terroristes, qui ne savent même pas écrire correctement leur nom, mais qui savent fabriquer à la perfection une bombe et la faire exploser à distance par l'intermédiaire de systèmes d'allumage perfectionnés.» Ces recrues de 15 et 17 ans sont, au-delà de la question terroriste, un problème de première instance pour les autorités, qui doivent agir vite, et engager une véritable course contre la montre. Et se poser surtout des questions sur le pourquoi de ces allégeances. Y apporter des réponses sérieuses. Et procéder à l'exécution de plans de prévention aux niveaux social, économique et religieux...