Malgré son allégeance réelle ou fictive à Al Qaîda, Droukdel n'a pas vraiment réussi à faire l'unanimité. De nombreux terroristes n'ont pas hésité, selon des sources sûres, à lui reprocher son attitude «sectaire» au profit d'une certaine catégorie. Après le retrait non déclaré de Ben Mokhtar, Droukdel a pris conscience qu'il n'avait pas les moyens de contrôler la zone9. Afin de se donner les «allures» d'un véritable chef qui commande tout le territoire, il jeta son dévolu, par désespoir de cause, sur un certain Mossaâb Abou Daoud. Ce dernier n'avait aucune influence sur les éléments de la zone sud. Droukdel le savait mais affirmait le contraire afin de maintenir le «filon». De tous les temps, Ben Mokhtar avait fait cavalier seul, et ce n'est certainement pas lui qui va accepter d'être commandé par Droukdel. Les terroristes, qui ont eu l'occasion d'approcher Ben Mokhtar, savaient pertinemment que nul ne peut dicter sa loi à celui que l'on a surnommé Laouar (le borgne). Celui-ci, même en retrait au Mali, avait toujours son mot à dire. Droukdel le sait et Mossaâb Abou Daoud aussi ne devrait pas l'ignorer. Ben Mokhtar avait reformé son groupe entre 1999 et 2002, loin du regard des émirs du Nord. Tous ceux qui ont fait le voyage jusqu'à Ghardaïa et parcouru l'axe Ghardaïa-El Menéa, savent qu'il est difficile pour Mossaâb Abou Daoud, natif de Djelfa, de supplanter Ben Mokhtar dans cette région. Cependant, la reddition de Mossaâb est venue confirmer une chose: la déroute totale de Droukdel et de son groupe de tueurs. A l'inverse de ce que pensent de nombreux observateurs, les dissensions qui secouent le Gspc n'ont pas commencé après le ralliement de ce groupe à Al Qaîda. Mais elles ont débouché sur des batailles rangées bien avant, à cause de la lutte pour la ghanima (butin). La dernière histoire en date concerne un certain Abou Al Haïthem. L'affaire de la rançon perçue à la suite de la libération des otages allemands, enlevés en 2003 près de Djanet, n'a pas encore livré tous ses secrets, et El Para ou Ben Mokhtar en savent sûrement quelque chose. Les problèmes liés à l'achat et l'acheminement des armes et les immenses sommes détournées ont fait des ravages au sein du Gspc. Même quand El Para était terré dans les Aurès, des dissensions existaient entre lui et Hattab, puis entre Mokhtar Ben Mokhtar et El Para. L'Expression avait, dans les précédentes éditions, rapporté le contexte de ces dissensions. Ce que Mossaâb n'a pas dit, c'est que la «voie kamikaze» n'a pas emballé «grand monde» au sein du Gspc. L'explication est toute simple: la quasi-totalité des terroristes ne sont nullement convaincus du «combat» qu'ils mènent. Tous sont persuadés qu'il ne s'agit pas de djihad. Aucun des tueurs de Droukdel n'a accepté d'aller «se suicider» pour une cause à laquelle ils ne croyaient pas. C'est cela la vérité.