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Le legs patrimonial transmis
LES TISSEUSES DE TAPIS D'ATH HICHEM
Publié dans L'Expression le 30 - 08 - 2007

Ces cours d'apprentissage constituent particulièrement un moyen d'expression de leurs sentiments de femmes.
Les Ath Hichem, un des villages de la commune de Ath Yahia, à Aïn El Hammam en haute Kabylie, nous renvoie immanquablement à parler du tapis et de ses tisseuses aux doigts de fées qui ont permis à ce produit artisanal de traverser des siècles sans subir la moindre ride.
Le mérite dans la conservation et la transmission de ce legs culturel impérissable revient incontestablement à Mme Taous Ben Abdeslam, doyenne des tissières d'Ath Hichem, âgée aujourd'hui de 102 ans, et vivant toujours au village qui l'a vue naître en 1905.
De tradition typiquement berbère, les tapis d'Ath Hichem sont réputés pour la richesse des signes qui les composent, reflets d'une symbolique riche et dont l'histoire retrace le vécu de la tisseuse. Chaque motif a sa cohérence et ses règles géométriques, confectionné à la main avec sept fils de couleur, rouge, vert olive, bleu ou encore sombre sur fond indigo.
Cette centenaire a consacré le plus clair de son temps à dispenser, à l'école de tissage de la localité, créée en 1892, des cours d'apprentissage du métier de tisserand à plusieurs générations de femmes qui, à leur tour, l'ont transmis à leurs filles. Na Taous, comme aiment à l'appeler ses intimes, avait représenté, en 1965, l'Algérie à la célèbre Foire internationale du tapis à Paris (France), où ses chefs-d'oeuvre ont gardé leur authenticité intacte telle que Avantous connu dans la région, la Aâban dans ses variétés de Vuzemmum et Vu meyy tsekwrin (tapis coloré sur fond sombre) et aâdil dans sa variété appelée Aqejir uyazid et Tuccar timezymin (tapis à peine coloré sur fond blanc avec du rouge et du bordeaux), destiné à être porté sur le dos de la mariée,. Il y a aussi Akhellel (couvre-lit blanc avec de fines stries crème ou d'autres tons), ont recueilli une large reconnaissance.
Dès leur jeune âge, les filles d'Ath Hichem sont initiées au tissage qui représente leur source de vie.
Ces cours d'apprentissage constituent particulièrement un moyen d'expression concernant les sentiments de femmes, guère gâtées par les dures conditions de vie dans cette région montagneuse. En témoignent les motifs berbères que les tisserandes confectionnent patiemment pour mettre en exergue l'usage décoratif et esthétique du tapis, mais aussi et surtout exprimer la souffrance et l'espoir refoulés de ces femmes fières, affairées derrière leur métier à tisser pour donner forme à autant de symboles, dont beaucoup n'ont pas, jusqu'au jour d'aujourd'hui, livré tous leurs secrets, au grand regret des puristes et stylistes.
A travers les motifs de décoration du tapis, les tisseuses traduisent leur vécu de femmes, tout en chantant des poèmes Ichwiqan et en exécutant ce travail de fourmi derrière leur métier à tisser, dressé à l'aide de perches taillées dans le cèdre ou le pin ramenées du haut du Djurdjura par les hommes.


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