De Sidi Aïch à Tadmaït et d'Azeffoun à Draâ El-Mizan, la Kabylie a baissé rideau. La Kabylie a massivement suivi l'appel à la grève de deux jours lancé par la Cadc de wilaya. Commerces, cafés, services publics et entreprises privées ont fermé, donnant ainsi, une once de plus au climat déjà lourd. Des escarmouches ont été observées, dans la matinée d'hier, au niveau de la permanence de la Cadc, occupée par les CNS. Selon des sources, il semble qu'un élément des CNS ait atteint d'une pierre, lancée par une fronde, une jeune fille de passage. Les escarmouches n'ont heureusement pas dégénéré. A.Bouzeguène, une daïra située à environ 50 km à l'est du chef-lieu de wilaya, la population a mis le feu à la brigade de gendarmerie locale qui a été évacuée la veille, en pleine nuit. La petite ville a décidé de faire subir à la bâtisse, le même sort que celui réservé à la brigade d'Azazga. Aïn El-Hammam, Iferhounène, Larbaâ Nath Irathen ont, à l'image de plusieurs autres régions, suivi la grève, tout comme Bouzeguène, Azazga et Fréha. A Azazga, ce sont neuf manifestants qui ont été présentés devant le tribunal, ils seront condamnés à 6 mois de prison ferme. A Tassaft, après deux jours d'affrontements assez violents, la journée d'hier a été marquée par l'enterrement de Youcefi Azzedine, mort des suites de blessures par balle. Au sud de la wilaya, c'est Draâ El-Mizan et Tizi Ghennif qui ont connu de violentes échauffourées. A Draâ El-Mizan, la tension qui dure depuis vendredi est des plus tendues. La ville fermée recense encore des émeutes aux environs de la gendarmerie. Hier, les gens s'échangeaient les nouvelles à propos du blessé et des quatre adolescents arrêtés samedi dernier et libérés après, dit-on, avoir été sérieusement passés à tabac. Certains sont allés jusqu'à évoquer l'utilisation de la gégène, ce qui, évidemment, n'a pu être confirmé. En fait, la situation est toujours explosive. La même situation règne à Tizi Ghennif où les manifestants ont réuni les urnes pour les brûler. Si à Boghni, où la grève a été respectée, des escarmouches dans les environs de la gendarmerie étaient signalées et le marché hebdomadaire fermé à Mechtras, tout le monde se tenait le ventre, hier vers 10h. Heure où expirait l'ultimatum donné à la brigade pour évacuer les lieux. Mechtras, ayant connu une semaine fort agitée, a recensé plusieurs blessés. Hier matin, il semble que les «renforts» ont quitté la ville, alors que le chef de brigade a déclaré à la population qu'«il attendait des ordres». Selon des sources, il semble que tout a commencé, quand les habitants de Mechtras ont appris que la brigade de Boghni allait être évacuée. Et c'est là qu'ils ont décidé de demander, eux aussi, la délocalisation de la brigade locale. A Tadmaït, c'est dans la soirée de samedi que les choses se sont gâtées. Les émeutes ont causé des blessures à deux manifestants. A Draâ Ben Khedda, où généralement en soirée, éclatent des escarmouches, la ville a également baissé rideau. A Tizi Ouzou-Ville, tout était fermé, y compris les banques, la poste et les autres services publics, sans oublier les commerces et les cafés. Hormis quelques boulangers qui ont assuré le pain aux clients en début de matinée et quelques pharmacies ouvertes, Tizi Ouzou faisait peur avec ses rues vides. Les quelques passants rencontrés ne parlaient que de Saddouk, Benastou Idriss, 38 ans, père de 2 enfants, victime d'une bombe lacrymogène, qui a rendu l'âme hier à l'aube au CHU Nédir de Tizi Ouzou, où il avait été transféré et admis pour un traumatisme crânien le 20 mars. Quant à Hamdi Rabah, le blessé de jeudi dernier, il est, selon des sources hospitalières, dans un état critique. C'est donc, dans une atmosphère très tendue que la Kabylie a observé l'appel à la grève de la Cadc. Une grève, il faut le souligner, massivement suivie.