A la rencontre à laquelle M.Baker avait convié «les parties en conflit autour de la souveraineté sur les territoires du Sahara occidental», le Maroc avait été «omis». Malgré le rejet par le Front Polisario du plan Baker, le représentant du secrétaire général de l'ONU persiste et signe, en invitant les représentants du Polisario, partie du conflit, et l'Algérie et la Mauritanie à titre d'observateurs, se réservant le droit de défendre lui-même les intérêts du trône alaouite. La question du Sahara occidental reste la dernière cause qui rassemble tous les Marocains derrière leur roi et derrière le gouvernement de M.Youssoufi. Avec le séisme politico-médiatique qu'a soulevé la résurgence inattendue de l'affaire Ben Barka, la fin de l'état de grâce du jeune souverain Mohamed VI, le retour de l'armée aux affaires politiques, après que feu Hassane II l'en eut écartée, les Etats-Unis craignent que l'application des résolutions de l'ONU ne déstabilise profondément et durablement le régime marocain. Echaudé par l'expérience algérienne, et la série d'erreurs d'appréciation des futurologues américains, la Maison-Blanche se refuse désormais à encourager l'aventurisme politique dans des pays à haute valeur géostratégique, aux portes de l'Europe. C'est donc probablement sous la pression américaine que M.Kofi Annan s'est fendu du projet d'accord-cadre, au mépris des diverses résolutions de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité. En fin de compte, le rejet par le Polisario des propositions de Baker n'est pas une fin de non-recevoir définitive, puisque selon le porte-parole de la délégation sahraouie, M.Mahmoud Abdelfatah, le Polisario n'a exprimé que «ses réserves et ses objections vis-à-vis du projet d'accord-cadre» ce qui signifie que, au prix de quelques arrangements formels, les Sahraouis, ne seraient pas opposés au principe lui-même. Autant pour l'Algérie qui, ne faisant pas partie du conflit, quoi que puisse en dire les Marocains, ne peut se permettre d'être plus royaliste que le roi.