L'Ugta s'offre un superbe cadeau à la veille de son XIe congrès. La Centrale syndicale que l'on estimait en perte de vitesse, semble vouloir rattraper le temps perdu. Et à la guerre comme à la guerre. Il va chasser sur les terres du Cnes, le Syndicat national de l'enseignement du supérieur. Le combat se fera à la loyale et dans le respect des lois. L'Union générale des travailleurs algériens procédera, aujourd'hui, à 9h, à l'université de Bouzaréah (Alger) à la création de son syndicat de l'enseignement supérieur. Ce dernier, chasse gardée du Cnes, se verra investi par un nouveau concurrent de poids: l'Ugta. M.Salah Djenouhat, secrétaire national chargé de l'organique et considéré comme le n°2 du côté de l'ex-Foyer civique, que nous avons joint par téléphone, n'a pas caché sa satisfaction et son optimisme. «L'Ugta s'est toujours mise en conformité avec la loi, elle compte bien élargir la base de ses adhérents», a déclaré le responsable syndical. Doit-on croire que l'Union générale des travailleurs algériens a changé le fusil d'épaule? Sidi-Saïd, n'a, en effet, eu de cesse de le répéter: «L'Ugta privilégie le dialogue à l'affrontement». Dans le cadre de cette stratégie de la pratique des luttes syndicales, l'Union générale des travailleurs algériens s'est imposée tout naturellement comme le partenaire social privilégié et incontournable du gouvernement. Unique représentant des travailleurs algériens, il a mis dans son escarcelle tous les avantages, notamment les augmentations des salaires accordées aux salariés lors des différentes bipartites ou tripartites. Après avoir régné sur le monde syndical depuis l'Indépendance, de façon hégémonique et sans partage, l'Ugta a vu son influence décliner avec l'avènement du multipartisme et l'ouverture du champ syndical. L'assassinat de son leader charismatique, Abdelhak Benhamouda, s'il n'a pas été ressenti comme un coup de grâce du côté de la place du 1er Mai a, cependant, sérieusement ébranlé l'édifice. L'apparition des syndicats autonomes dans le paysage syndical algérien a apporté du sang neuf au mouvement. Les organisations syndicales ont renoué avec les traditionnelles revendications qui ont caractérisé le monde ouvrier. Le retour à cette pratique orthodoxe, est mal perçu du côté de la place du 1er Mai. Elle jette la suspicion sur la plus ancienne des organisations syndicales algériennes qui se retrouve pointée du doigt. Ses accointances avec le pouvoir mettent en doute et jettent le discrédit sur sa mission originelle. C'est aussi, là, une autre facette de l'Union générale des travailleurs. En plus de leurs appartenances et de leurs activités partisanes, certains syndicalistes siègent au sein des deux Assemblées: L'APN et le Sénat. Au regard de la loi ce n'est aucunement incompatible mais pour le commun des mortels cela fait désordre dans son esprit. Cela donne aussi du grain à moudre aux syndicats autonomes qui ne ratent aucune occasion pour épingler ce «grand frère ennemi». La réciproque étant une loi de la nature, l'on n'est guère avare de mots de l'autre côté. Qu'en pense Ahmed Amrani, une ancienne figure du syndicalisme algérien. «Le syndicalisme en Algérie s'est dispersé après l'avènement du pluralisme syndical», a-t-il déclaré lors d'une conférence nationale sur les libertés syndicales organisée à Alger au mois de février par le Cnapest, le Syndicat national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique. «Les rapports entre l'Union générale des travailleurs algériens, l'Ugta et les syndicats autonomes sont des rapports d'exclusion réciproques» a fait remarquer M.Amrani. Le syndicaliste leur conseille de dépasser ces querelles intestines qui ne répondent aucunement aux attentes des travailleurs. En attendant, l'Ugta semble s'être offert un superbe cadeau avec son initiative et compte porter triomphalement Sidi Saïd à la tête de la Centrale syndicale.