La Centrale tente d'occuper de nouveau les hôpitaux en passant par le syndicat des gestionnaires. L'Ugta a officiellement pris sous sa tutelle, durant ce week-end, le syndicat des gestionnaires de la santé. Un syndicat plus proche du patronat qu'il ne l'est du monde du travail à proprement parler. Ce syndicat, en effet, n'entretient pas les meilleurs rapports avec les principales organisations représentant ce milieu, à savoir le Snpsp, le Snpssp et le Snapap. Des sources proches de ces syndicats, dits autonomes, «condamnent cette approche contre nature», précisant qu'elle vise en premier lieu à permettre de nouveau à l'Ugta «d'investir le secteur de la santé». Il est à rappeler, en effet, que l'organisation syndicale de Sidi Saïd a fini, avec le temps, par être supplantée dans ce secteur. Sa fédération, qui n'a pu tenir de congrès depuis près d'une dizaine d'années, n'a plus sa représentativité d'antan. Les mêmes sources précisent que «grâce aux gestionnaires, l'Ugta pourra réoccuper le secteur sans avoir besoin de passer par de grandes campagnes de sensibilisation». Les résultats de la bipartite, rappellent nos sources, ont surtout concerné des secteurs sur lesquels la Centrale n'a plus la même emprise qu'avant. Au niveau de l'enseignement supérieur, en effet, le même constat ou presque est dressé par les observateurs de la scène syndicale nationale. Le Cnes, en effet, représentant quasi exclusif du secteur, n'a laissé à l'organisation syndicale de Sidi Saïd que des postes subalternes et/ou administratifs. Nos sources ajoutent que, curieusement, «ce sont les secteurs où l'Ugta a perdu sa représentativité qui ont bénéficié d'augmentations. Ce sont aussi les secteurs où le bouillonnement était à son comble et qui devaient aller vers des grèves dès la rentrée sociale». L'entrée du syndicat des gestionnaires de la santé publique, donc, s'inscrit en droite ligne de cette nouvelle logique. A savoir, remettre à flot la Centrale et s'en servir pour affaiblir les syndicats autonomes. Les récentes déclarations du ministre du Travail, lui même ancien leader d'un syndicat autonome, sont assez révélatrices des intentions qui animent les pouvoirs publics. «A l'exception de l'Ugta, aucun des syndicats autonomes activant actuellement n'est conforme à la législation». Les leaders des organisations incriminées comme un seul homme, se défendent en précisant que «d'abord, il a fallu être conforme à la loi pour obtenir des agréments. Quant à la représentativité, il faut bien croire que le gouvernement interprète à sa convenance les termes de la loi 90-14». Et de s'indigner qu'«il est absolument inconcevable d'exiger 20 % de représentativité à l'échelle nationale, c'est-à-dire par rapport à tous les travailleurs algériens alors qu'il s'agit de syndicats corporatistes». Pis encore, s'indigne le secrétaire général du Snapap joint, hier, par nos soins, «le pouvoir nous a empêchés de devenir un syndicat représentant tous les travailleurs en rejetant notre demande d'agrément cautionnant notre congrès portant transformation du Snapap en Snata» (syndicat national des travailleurs algériens). Autre anomalie de taille, des leaders syndicaux, engagés dans cette lutte pour un retour en force de l'Ugta, sont nommés par décret aux postes professionnels qu'ils occupent. Or, la loi 90-14 est très claire sur ce sujet. Un pareil cumul est absolument prohibé, puisque le syndicaliste devient tout bonnement juge et parti représentant, d'un côté, les travailleurs et de l'autre l'administration. Dans tous les cas de figure, une décantation sérieuse est souhaitable dans le monde syndical, estiment des observateurs avertis. En attendant, poursuit-on, la démarche des pouvoirs publics peut fort bien s'avérer être une arme à double tranchant puisqu'elle peut se retourner contre eux en attendant de voir sur quoi va déboucher la future tripartite, mais aussi les résultats des quatre groupes de travail mis en place à la suite de la bipartite des 8 et 9 septembre derniers.