Le Conseil de sécurité reporte l'envoi de son équipe «d'établissement des faits», dans les territoires occupés, à la demande d'Israël. La communauté internationale veut savoir ce qui s'est passé au camp de réfugiés de Jenine totalement détruit par l'armée israélienne. «Une horreur qui dépasse l'entendement», affirment les uns, «un enfer et une catastrophe humanitaire», renchérissent les autres. Bref, selon les déclarations de personnalités internationales et des ONG, qui ont visité le camp martyr, il s'est effectivement passé à Jenine quelque chose qui doit absolument être élucidé. Mais l'unanimisme de la communauté internationale à établir les faits sur ce qui s'est passé dans cette ville palestinienne occupée se heurte aux entraves délibérées de la partie israélienne, qui rechigne à laisser l'équipe onusienne faire son travail d'investigation. Le refus israélien de coopérer est d'autant plus curieux que l'ONU, - du fait de l'opposition des Etats-Unis à l'envoi d'une commission d'enquête (menaçant même de faire usage de leur veto)-, s'est contentée de mettre sur pied une «équipe» chargée d' «établir les faits» et dont les conclusions seront présentées au secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, et non point au Conseil de sécurité pour leur donner la suite que la situation pourrait alors exiger. Même si cette mission, confiée à l'ancien président finlandais, Martti Ahtisaari, ne semble donc pas devoir aboutir à des sanctions contre Israël, cela n'en préoccupe pas moins les Israéliens qui semblent vouloir en contrôler la composante pour, sans doute, limiter au maximum son efficience et la mise en lumière de ce qui s'est passé au camp palestinien. La réaction de la communauté internationale est unanime qui condamne la prétention d'Israël d'être juge et partie dans une affaire où l'Etat hébreu se trouve sur le banc de l'infamie. Ce qui a fait dire au secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères, Ben Bradshaw, qui résume parfaitement l'opinion générale, «Israël peut empêcher cette mission de faire son travail, mais ce n'est pas du pouvoir d'Israël de décider quels sont les mem-bres qui doivent composer cette mission». Le refus d'Israël de coopérer avec la mission de l'ONU, assure le diplomate britannique «serait une chose complètement insensée, la dernière chose à faire dans une série d'erreurs cataclysmiques de communication par le gouvernement israélie» indiquant que «si Israël n'a rien à cacher, il n'a absolument aucune raison de ne pas permettre à cette équipe d'aller de l'avant», avertissant : «Il est absolument essentiel qu'Israël comprenne qu'il ne peut pas continuer à défier la communauté internationale et l'opinion mondiale (...) il se cause à lui-même d'irréparables dégâts.» La résolution 1405 de l'ONU est en ce sens claire dans la mesure où il y est indiqué qu'il était attendu que «le gouvernement israélien coopère pleinement avec elle» (Ndlr, l'équipe de l'ONU d'établissement des faits). Par ailleurs, après une réunion urgente hier, à huis clos, du Conseil de sécurité, à la demande de la Syrie, un communiqué a été rendu public réclamant d'Israël qu'«aucun mal ne soit fait au président de l'Autorité palestinienne», soulignant que Yasser Arafat devait «retrouver sa liberté de déplacement afin de pouvoir assumer pleinement ses fonctions». Toutefois, le Conseil de sécurité a accepté de retarder légèrement le départ de la mission onusienne à Jenine, Kofi Annan, affirmant cependant, selon son porte-parole, Fred Eckhard, qu'il «s'attendait à ce que l'équipe soit au Proche-Orient d'ici à samedi prochain». Il est grand temps qu'Israël redevienne un Etat comme les autres, passible de condamnations et de remises à l'ordre de la part de la communauté internationale et aussi, et surtout, tenu de se conformer aux résolutions de l'ONU. Il est patent que le dossier palestinien n'est pas une question interne à Israël, mais concerne prioritairement la communauté internationale et l'ONU qui, par le partage de la Palestine historique, ont favorisé la naissance de l'Etat hébreu. Aussi, pour permettre une issue équitable à la crise proche-orientale, il est urgent que le Conseil de sécurité et l'ONU retrouvent toutes leurs prérogatives au Proche-Orient. Israël, partie au conflit, ne peut, en tout état de cause, prétendre solutionner à sa convenance un problème de décolonisation doublé d'un déni de droit envers le peuple palestinien.