«Notre devoir n'est pas de nous débarrasser du fou mais de débarrasser le fou de sa folie» dixit Albert Londres. Phénomène, ou simple fait social ordinaire, qui ne cesse d'occuper une grande place dans notre société? Les mendiants et les malades mentaux, ou les «fous», comme ils sont communément appelés par leurs semblables «raisonnables», règnent en maîtres dans nos villes. Et pour répondre à la question, les gens trouvent toujours matière à contourner l'embarrassante, voire l'humiliante interrogation concernant cette frange de la société, que sont tout simplement les mendiants et les malades «vagabonds». A Bouira, comme dans d'autres régions du pays, leur nombre ne cesse de croître. Ils arrivent de partout par vagues. «J'ai l'impression que chaque matin je fais la connaissance d'un nouveau mendiant ou d'un malade mental», ironise un jeune, rencontré sur la place publique. Toutes les ruelles sont envahies. Il est devenu impossible d'en parcourir une sans être apostrophé, soit par un quémandeur d'aumône soit par un malade mental. Des scènes devenues familières. Mais le plus remarquable est cette assiduité de ces «mendiants» aux mêmes endroits. Ils ne font rien au hasard. Ils ont leur stratégie dans leur choix de lieu. A plusieurs reprises, des mendiants en sont arrivés aux poings pour une place, bien cotée. Ces vieilles et vieux, femmes et filles, accompagnées de petits enfants, parfois en bas âge, mènent une vie de «gitans». Ils sillonnent tous les quartiers de la ville, font du porte-à-porte. Parfois, ils n'hésitent pas à sillonner les différentes communes. La journée de vendredi est spéciale. Le marché local est pris d'assaut aux premières lueurs par ces «quémandeurs» d'aumône. Si les uns prennent possession des entrées, les autres font la tournée. Question de soutirer un «sou» soit aux commerçants, soit aux acheteurs. Dans l'après-midi, ce sont les mosquées qui deviennent leurs lieux de prédilection. A chacun sa mosquée. Quelques enfants «mendiants» choisissent les quais de la gare routière. Ces infortunés guettent, chaleureusement, les quelques sous qui se glissent de la main d'un semblable plus au moins aisé. Concernant les malades mentaux, les choses tournent parfois au drame. Que de gens sont agressés et harcelés par ces «fous» errants. Les exemples ne manquent pas. «Pour aller en ville, il faut que quelqu'un m'accompagne», regrette une dame. Et d'ajouter: «Mais c'est étonnant! Comment peut-on laisser ces gens malades et dangereux en liberté, on doit les interner.» A l'agressivité physique, il y a lieu de signaler l'agressivité visuelle. En effet, des malades mentaux affichent leur nudité ou lancent à tue-tête des obscénités à faire rougir. Tel est le décor des rues de Bouira. Il est temps que les pouvoirs publics prennent en charge ces deux fléaux avant que l'irréparable n'arrive.