Voilà qui ferait se retourner dans sa tombe le président Houari Boumediene. En 2009, Abbas El Fassi déterre une fabulation oubliée par le plus téméraire des Marocains. Le Premier ministre du Maroc et secrétaire général de l'Istiqlal a tenu de très graves propos en déterrant une fabulation abandonnée depuis longtemps par les plus téméraires des responsables politiques marocains. Tenez-vous bien, en 2009, Abbas El Fassi n'a pas trouvé mieux que de revendiquer l'appartenance de Tindouf au Royaume marocain, qu'il appelle dans son jargon les territoires marocains orientaux. «L'Istiqlal reste attaché au droit du Maroc vis-à-vis de son Sahara oriental», a-t-il déclaré lors de la tenu du 15e congrès du Parti nationaliste de l'Istiqlal (PI), qui s'est achevé il y a trois jours à Rabat. Voilà qui ferait retourner dans sa tombe le défunt président Houari Boumediene. Là, M El Fassi fait fausse route, totalement, il n'y a pas de soi-disant Sahara oriental. Il n'y a jamais eu de Sahara oriental marocain. Et si jamais un tel fait aurait existé, il a été résolu par le traité d'Ifrane, de 1972, qui officialise les frontières existantes, telles qu'elles sont aujourd'hui, entre l'Algérie et le Maroc. Aussi, Abbas El Fassi ferait bien de revoir un peu l'histoire et la géographie de son pays pour comprendre ce qu'il y a de vain, sinon de ridicule, dans les visées expansionnistes du Royaume chérifien qui revendiquait encore, au milieu des années 60, la Mauritanie. Rappelons que le Maroc n'a reconnu cet Etat qu'à la fin des années 1960, alors que ce pays a accédé à l'indépendance en 1960, dans la foulée de la guerre d'Algérie qui a donné l'élan à la libération de nombre de pays africains francophones. Ne s'arrêtant pas à cette histoire de «territoires orientaux du Maroc», M El Fassi, s'attaque à l'Algérie avec une perfidie déconcertante en l'accusant de tous les maux dont souffre son pays. Il cite alors le problème de la réouverture des frontières. A ce sujet, il semble que le Premier ministre marocain n'a toujours pas compris qu'il s'agit là de la souveraineté nationale de l'Algérie et surtout que cette réouverture relève de la mise à plat de tous les contentieux opposant Alger à Rabat. Les circonstances dans lesquelles l'Algérie s'est vue contrainte de fermer ses frontières ouest sont connues et il n'y a pas lieu d'y revenir. Notons toutefois, qu'en imposant les visas aux Algériens et en fermant ses frontières avec l'Algérie en août 1994, suite à l'attentat terroriste contre l'hôtel Asni à Marrakech, et en accusant les services algériens, le Maroc a pris la responsabilité d'ouvrir une crise entre les deux pays, crise qui s'est aggravée au long de ces dernières années. Il est patent que le Maroc n'a pas choisi la voie de la sagesse pour trouver une issue aux différends entre nos deux pays, en faisant usage de faux pour, d'une part, tromper l'opinion publique internationale, et d'autre part, calmer le peuple marocain qui ploie sous le poids des problèmes sociaux. Si, effectivement, le Royaume alaouite veut trouver une solution consensuelle aux problèmes de la région et particulièrement celui du Sahara occidental, il doit négocier «réellement» avec le belligérant que reconnaissent les Nations unies et la communauté internationale qu'est le Front Polisario, sans préalable et surtout sans imposer un plan que l'on demande à son vis-à-vis d'approuver. Or, Rabat vient avec un plan «d'autonomie» pour les Sahraouis alors que le problème de fond est d'abord de savoir à qui appartient le Sahara occidental: au Maroc ou aux Sahraouis? Toute la question est là. Mais Rabat qui parle de l'«intégrité» territoriale du Maroc estime donc cette question résolue alors qu'il n'en est rien, comme l'affirme dans ses attendus l'avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) en 1975. Intervenant à l'ouverture du congrès de son parti, M.El Fassi a rappelé que le Conseil de sécurité de l'ONU a qualifié l'initiative marocaine, à propos de la question du Sahara Occidental, de «sérieuse» et de «crédible», soulignant qu'elle constitue, de ce fait, «une bonne plate-forme pour parvenir à travers les négociations à une solution politique équitable, réaliste et définitive, acceptée par toutes les parties et mettant un terme au conflit préfabriqué, qui a duré plus de trente ans». Ce faisant, M.El Fassi feint d'oublier que les Nations unies enregistrent la question du Sahara Occidental comme relevant d'un problème de décolonisation. Sur ce plan, la Cour internationale de justice, mandatée par le Conseil de sécurité, a, en deux occasions (1964 et notamment en 1975 après l'envahissement du Sahara Occidental par le Maroc), affirmé qu'il n'existait aucun lien de sujétion des territoires de Saguiet El Hamra et du Rio de Oro (qui forment le Sahara Occidental) avec le sultan du Maroc dans les périodes considérées (XVIIIe et XIXe siècles). Dans son intervention, le Premier ministre marocain a estimé qu'a travers la position algérienne, «le monde réalise que les entraves des efforts des Nations unies, auxquels coopère le Maroc, sont du fait de l'Algérie qui soutient la thèse du séparatisme et encadre le groupe séparatiste à contresens de l'Histoire et de la géographie, (...)». Ainsi, M.El Fassi fait mine d'ignorer que l'Algérie reste attachée au principe cardinal du droit des peuples à l'autodétermination.