La Chambre française de commerce et d'industrie en Algérie (Cfcia) a demandé une audience au Premier ministre afin d'obtenir des explications sur les décisions concernant l'investissement étranger. L'instabilité juridique est de plus en plus décriée par les investisseurs étrangers en Algérie, comme en témoigne la réaction des responsables de la Cfcia. Une source émanant de cette organisation nous a effectivement indiqué qu'une rencontre avec le futur Premier ministre n'est pas à écarter pour obtenir des éclaircissements sur les instructions de Ouyahia. Si le patronat français n'a plus de raison de cacher son scepticisme, les opérateurs algériens, interrogés par nos soins sur ce dossier, préfèrent s'exprimer sous le sceau de l'anonymat. Officiellement, les deux sources insistent sur le fait que les décisions du gouvernement algérien relèvent des attributions de souveraineté. En aparté, elles vont jusqu'à parier sur la possibilité d'un recul du gouvernement et sur l'annulation de ces décisions. Ces dernières ne seraient que conjoncturelles. D'ailleurs, leur légalité est remise en cause. Pour preuve, nos interlocuteurs se basent sur les dispositions de l'ordonnance 01-03 du 20 août 2001 relative au développement de l'investissement et amendée en 2006. Les articles de l'ordonnance écartent toute discrimination entre investisseurs nationaux et étrangers. Même si le gouvernement veut revenir sur cet avantage, cela ne pourrait être le cas que si la loi est de nouveau amendée dans les formes légales, soit en passant par le Parlement, ce qui n'est même pas abordé par le programme électoral du président de la République. Outre cet écueil juridique, il est estimé que la mesure permettant à l'Etat algérien de disposer de 51% du capital des entreprises publiques aurait comme effet de dissuader les entreprises étrangères à s'installer en Algérie. Les étrangers ne comprennent toujours pas le changement brutal des règles du jeu, comme cela a été le cas lors de l'institution d'une taxe de 15% sur les bénéfices transférables des sociétés algériennes dont les maisons mères sont implantées à l'étranger. Cette disposition a néanmoins le mérite d'être inscrite dans la loi de finances. Même la décision concernant les entreprises d'importation devant céder au moins 30% de leur capital à un partenaire algérien est mal perçue. Les organisations patronales algériennes ont déjà reçu des informations de la part des étrangers pour dire tout le mal qu'ils pensent de cette nouvelle règle. Les notaires ont d'ailleurs reçu des instructions et ont commencé à demander aux entreprises étrangères désirant effectuer un quelconque acte, comme le changement de siège social, de se conformer à la décision du gouvernement. Les interrogations des étrangers se focalisent sur certains points comme celui de l'application avec effet rétractif de ces décisions. Dans ce domaine, même les patrons algériens interrogés nous ont souligné qu'ils s'opposent à ce genre d'initiatives puisque les lois ont expressément écarté ce comportement et pas seulement dans le domaine économique. L'autre motif d'inquiétude réside dans l'absence d'informations sur le sort des entreprises ayant à la fois des activités de production et d'importation. Pour l'instant, ces mesures sont mises sur le compte d'un nouveau concept faisant son entrée en Algérie et qui est celui du patriotisme économique, ce qui n'est pas pour déplaire en principe aux opérateurs économiques locaux. Ces derniers sont d'accord pour dire que même dans les pays développés, certains secteurs comme celui de la distribution sont réservés aux nationaux. C'est surtout la méthode qui est contestée.