Les deux partis sont traversés par des crises aiguës jamais atteintes jusque-là. Le RND et le MSP sont deux partis que rien ne destinait à connaître un avenir quasi similaire. D'obédiences diamétralement opposées, de naissances diversement motivées et de programmes contradictoires, ces deux formations politiques n'étaient pas prédisposées à suivre des cheminements aussi parallèles. Sans nul conteste, les résultats du scrutin du 30 mai passé ont sonné le glas pour le RND et le MSP. Le premier n'a plus sa majorité et a régressé en perdant plus d'une centaine de sièges, ce qui constitue une véritable catastrophe pour tous les cadres du parti, quelles qu'en soient les tendances. Le second, plus déstabilisé encore, a perdu son statut de premier parti islamiste du pays, ce qui représente pour Nahnah une humiliation dont il aura beaucoup de mal à se relever. La nomination du nouveau gouvernement, avec la reconduction des ministres appartenant à ces deux partis, n'a pas été pour arranger les choses. Tant s'en faut. La grogne au sein de ces deux formations n'a eu de cesse d'aller crescendo au point d'atteindre des points de non-retour. Les deux partis, hasard calendaire ou destins liés par la force des alliances contractées, connaîtront leurs moments de vérité le même jour, c'est-à-dire demain jeudi. Au RND, les choses sont encore loin d'être clarifiées. Les dirigeants du parti, connus pour être proches de Ahmed Ouyahia, ne désespèrent pas de le voir revenir sur sa décision. Contactés par nos soins, beaucoup d'entre eux nous ont confirmé que des contacts réguliers existent et qu'il y a de sérieuses chances pour que le secrétaire général du RND revienne présider la séance interrompue du conseil national et même reprendre les rênes du parti en prévision des futures élections locales. Les dirigeants du comité de sauvegarde du RND, comme de juste, ne l'entendent pas de cette oreille. Contacté hier, leur porte-parole, Aïssa Nouasri, nous a confirmé que les revendications restent les mêmes, à savoir le départ de tous les membres du bureau national, après celui du secrétaire général. Pour les animateurs de ce comité, la guerre à la succession a déjà commencé et c'est d'elle, et d'elle seulement, que dépendront l'avenir politique du parti, mais aussi et surtout ses résultats lors des élections locales prévues à l'automne prochain. Rien n'est réglé en somme. Le risque est même grand de voir les cadres du parti se donner en spectacle, une nouvelle fois, devant les militants et l'opinion publique. Cette probabilité est d'autant plus plausible que les animateurs du comité de sauvegarde du parti ont refusé les offres de réconciliation lancées par leurs «adversaires», déniant à ceux-ci le droit de s'exprimer au nom du parti et exigeant que la direction du parti soit mise entre les mains du bureau de la commission nationale demeurée en session ouverte depuis le week-end dernier. De leur côté, pas moins de 45 coordinateurs de wilayas ont apporté leur soutien à Ouyahia, exhortant ses détracteurs à revenir à la raison et à resserrer les rangs du parti. Les choses sont un peu moins graves au MSP, quoique dans ce cas de figure, il ne faille pas trop se fier aux apparences. En effet, ce parti a toujours su faire primer la discrétion, tant dans le développement de ses positions politiques que dans les quelques conflits stratégiques et/ou organiques qu'il a déjà eu à connaître par le passé. C'est sous cet angle, dès lors, qu'il convient d'appréhender la fronde vertement affichée par un des hommes forts du parti, Abderrezak Mokri. Membre de la direction nationale et président du groupe parlementaire du parti au niveau de la nouvelle Chambre basse du Parlement, ce député a franchement accusé Nahnah et ses proches d'avoir failli en étant restés trop longtemps au pouvoir sans avoir rien fait pour le peuple, mais aussi et surtout d'avoir accepté de faire partie de la nouvelle coalition gouvernementale alors que la sagesse aurait voulu que le parti se retirât afin de sauver ce qu'il y a encore à sauver et, même, de grignoter les parties de terrain concédées à la concurrence, celle du MRN en l'occurrence. Toujours aussi discrets, les dirigeants du parti ont refusé, hier, de nous parler. Tous, en revanche, se sont contentés de nous signaler que la réunion du majliss echoura est une rencontre ordinaire qui permettra au parti de faire le point sur la situation politique actuelle, sur les législatives passées, mais aussi de définir la stratégie future du parti. Il ne fait, néanmoins, aucun doute que cette rencontre sera celle des grands déballages et des règlements de comptes. En tout état de cause, ce week-end, très riche en événements politiques, risque fort d'être déterminant pour le RND et le MSP. Nous y reviendrons.