Après la réussite de la mise à niveau du port de Béjaïa, le cap est mis sur Oran: la perspective envisagée est la réception de 1,5 million de conteneurs par an. Il est 16h, la journée de travail tire à sa fin. Les deux employés de service des statistiques appuyés par le chargé de communication de l'Entreprise portuaire d'Oran (EPO) sont sur les nerfs. Ils sont noyés dans leurs calculs. La tutelle attend avec impatience la situation quotidienne du tonnage. Non loin de là, les différents chefs de service de l'EPO sont réunis depuis le matin pour débattre de l'audit interne; l'autocritique bat son plein. Au port d'Oran, la capitainerie assure le mouvement des navires. Les manutentionnaires continuent de vider les navires de leur contenu. Dix-sept ont été traités avec succès, quatre autres sont en rade attendant le feu vert pour accoster. Ce jour-là, 15.425 tonnes des différents arrivages ont été déchargées. Restent à bord des navires plus de 75.000 tonnes à mettre sur les quais. Les manutentionnaires assurent, à rythme époustouflant, toutes ces tâches, le moindre relâchement ou retard coûteront cher à l'entreprise. Le port d'Oran répond difficilement aux fortes «bousculades» des navires, chargés de conteneurs qui arrivent des quatre coins du monde. On se démène et l'on improvise pour mettre à l'abri toutes les marchandises qui arrivent en grande quantité chaque jour. Les espaces d'entreposage deviennent de plus en plus exigus. L'évolution du trafic a faussé les calculs des plus avertis, y compris des responsables hiérarchiques du secteur des transports. Au siège de l'entreprise, les préoccupations de la direction sont portent sur l'extension imminente du port, seul moyen de pallier le déficit d'espace d'entreposage et d'accueil des grands porteurs des conteneurs. Mais quelle sera cette extension qui devra se faire dans le court terme? La question est tranchée et le consensus trouvé. Il faut passer à l'action et procéder à l'élargissement du terminal du port, nous dit-on. La surface actuelle du terminal qui est de 12 hectares doit être triplée. Selon Zidi Reda, chargé de communication de l'entreprise, la capacité actuelle de l'entreposage est de 4600 conteneurs appelés aussi EVP (équivalent à vingt pieds). Du port d'Oran à celui de Marseille Le traitement des conteneurs est un véritable casse-tête. Il a augmenté de plus de 32% au premier trimestre de cette année. Il était de quelque 42.491 EVP au premier trimestre 2009 alors que durant la même période de 2008 le nombre de conteneurs traités frôlait les 32.000. Le taux de traitement est en constante hausse tandis que l'actuel terminal est en souffrance, faute d'espace, un vrai dilemme. De par l'évolution rapide que connaît le monde, l'entreprise portuaire d'Oran n'est pas en reste. Les responsables de l'EPO mettent le cap sur le traitement de 1,5 million de conteneurs/an d'ici à l'horizon 2026. «Nous allons mettre notre port au même niveau de trafic et de management portuaires que connaissent les ports de Barcelone et Marseille», a affirmé Semcha Mohamed, Directeur général de l'EPO. Ceci dit, a-t-il ajouté, «le port d'Oran doit être placé en pole position pour capter le trafic des navires de la partie occidentale de la Méditerranée vu le mouvement des navires qui traversent le détroit de Gibraltar». Ce sont en substance les déclarations du directeur général de l'EPO qui a dévoilé, en exclusivité à L'Expression, les grands axes du plan de développement de son entreprise pour lequel le ministère des Transports, la Société de la gestion des ports «Sogepo» et l'Entreprise d'Oran ont mis le paquet. La finalité est de faire du port d'Oran un pôle d'éclatement appelé dans le jargon technique le port de transbordement. Selon Semcha Mohamed, le port d'éclatement d'Oran sera une grande plate-forme qui servira à la réception des grands porteurs des conteneurs. Le port procédera, ensuite, au dispatching de ces derniers (conteneurs) vers les ports nationaux et ceux des pays voisins ne pouvant accueillir les gros porteurs de conteneurs comme la Tunisie et la Maurétanie, tel qu'il est d'usage actuellement au niveau du terminal d'Algesiras en Espagne. Dans le même sillage, le port de transbordement d'Oran servira de point de départ des conteneurs vers les pays subsahariens comme le Mali et le Niger. Pour ce faire, une panoplie de mesures a été adoptée tout récemment. En plus du programme de modernisation qui vient d'être lancé, la plate-forme du terminal du port fera l'objet de travaux d'élargissement dans les plus brefs délais. L'expansion du port d'Oran passera par deux phases, la première coûtera de 11 milliards de dinars tandis que la seconde 35 milliards de dinars. L'étude a été faite par le bureau d'études français Axelcium. L'inscription du projet est en attente de l'aval des ministères des Transports, des Travaux publics et des Finances. La première opération porte sur la dilatation de la surface actuelle qui atteindra 24 hectares tandis que la seconde phase est extra-portuaire. Celle-ci s'étalera vers l'est du terminal. «Oui au partenariat, mais à une condition...» Des travaux en mer seront entrepris. Une bonne partie des plans d'eau sera recouverte. La finalité est de mettre en place un terminal d'une surface totale de 30,2 hectares qui accueillera des navires de 3e et 4e générations qui peuvent transporter plusieurs milliers de conteneurs. Ce dernier sera pourvu d'équipements nécessaires dont plusieurs grues géantes pour conteneurs. La restructuration en question prendra plusieurs années mais l'objectif tracé sera atteint dans quelques années, selon Semcha Mohamed. Compte tenu de ces développements envisagés, plusieurs projets pharaoniques sont inscrits. Le département de Amar Ghoul a pris les devants en entamant les travaux de confortement de la jetée, qui ont été confiés à un groupe d'entreprises algéro-portugais. Aussi, une autoroute reliant le port, via sa sortie est, au quatrième périphérique est inscrite. Fini le casse-tête des encombrements causés par les poids lourds! En matière de trafic de marchandises, le port d'Oran est le troisième port d'Algérie après Alger et Béjaïa. Les importations et exportations traitées en 2008 ont ressorti le traitement de plus de 4,6 millions de tonnes, soit une hausse de 16,50% par rapport à l'exercice écoulé où l'on a traité 3,8 millions de tonnes. A fin 2009, la conteneurisation a atteint le taux de 37%. Par contre, le trafic des passagers a connu un recul de 4,06% en 2008. Les raisons invoquées sont liées à la crise économique et à la hausse des prix des billets appliquée par les compagnies de transport maritime. Le salon international tenu à Paris il y a un mois a été bénéfique au port d'Oran. Plusieurs compagnies de transport maritime se sont rapprochées des responsables de l'EPO. Il y a eu des contacts entre l'EPO et la société de la gestion des terminaux à conteneurs de Barcelone (PCB). L'idée d'un partenariat a été débattue entre les deux sociétés. Aucune suite n'a été donnée jusque-là. Selon Zidi Réda, responsable de la cellule de communication, l'Entreprise portuaire d'Oran est en quête d'un partenaire potentiel pour la réalisation et la gestion du terminal d'Oran. Aux dernières informations, le terminal attire la convoitise des entreprises françaises, suisses, espagnoles et les ports de Dubaï. Avant la concrétisation d'une telle perspective, les responsables du secteur ambitionnent de convaincre les plus grosses boîtes lors du Salon international des transports maritimes qui se tiendra à Oran au mois de juin de l'année prochaine.
