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Poésie et magie sont une seule et même chose
ABDALLAH BEN KERRIOU PAR B. BESSAIH / CE CHAMP DE MOTS DE H. LARBI
Publié dans L'Expression le 02 - 12 - 2009

Dans le destin d'un homme, il y a toujours une femme admirable qu'il ne connaîtra jamais!
Exceptionnellement, je présente côte à côte deux recueils de poésie. Rien de commun dans le fond entre ces deux publications, sinon la poésie et l'objet poétique, c'est-à-dire l'objectivité totale de l'amour total, que ce soit «sous le clair de lune» ou dans la «sombre nuit sans étoiles». Boualem Bessaïh nous propose Abdallah Ben Kerriou, 1869-1921, un poète de Laghouat et du Sahara (*) (1ère éd. Publisud, 2003), Hamid Larbi, Ce Champ de mots (**) (1ère éd. Levant, 2007), sa première plaquette de poèmes qui sont, dit-il, «Mes rêves fragmentés / dispersés par le vent / Et enterrés par le temps.» Là chaque créateur se fraie son chemin pour faire évoluer sa grande idée sur la beauté et l'amour de l'âme humaine. Ces deux poètes, qui ne sont pas contemporains, ont souffert d'étranges hantises, ce sont deux tempéraments différents: chez l'un, la passion est impétueuse et réaliste; chez l'autre, subtilement résignée. Ce mystère de l'union d'un homme et d'une femme, si souvent renouvelé dans la poésie universelle, s'inscrit comme un témoignage d'un état de ferveur dans les souffles poétiques du poète du Sud Abdallah Ben Kerriou (remis en mémoire par Bessaïh) et du poète errant d'aujourd'hui, Hamid Larbi, «sachant rêver» dans un exil (en Italie, en France) où «le néant transmue [son] présent». Mais la souffrance déclamée de l'un comme celle écrite de l'autre procèdent du même style qui nous place au centre du problème que nous pose une oeuvre où jaillissent là le chant d'un aède, ici le murmure d'une âme. Il s'agissait, pour le premier d'écrire des poèmes qui seront chantés, pour le second de continuer la tradition du poème dramatisé sur scène par lui-même, cependant il reste que l'on ne peut oser la comparaison, chacun son propre visage, chacun son propre monde, chacun sa propre passion, chacun son propre langage. J'ai découvert Abdallah Ben Kerriou et son amour pour la belle Fatna Azz‘anouniya de la famille Ben Salem de Laghouat, autrefois, grâce à mon professeur d'Arabe Sî Tahar Tidjini au lycée Bugeaud (aujourd'hui justement, Emir Abdelkader). Ancien responsable du scoutisme musulman et pédagogue conscient de sa mission, en ce temps-là, il nous lisait de sa voix bien timbrée et nous les expliquait, des passages d'une poésie dont les effets nous émerveillaient. C'était une part de nous-mêmes jusque-là ignorée qui s'éveillait à l'émotion de «notre» poésie populaire, en ces années dures, mais d'éveil pour nous les jeunes. J'ai encore à l'oreille ces fameux vers qui parlaient d'amour, et qui prenaient alors un sens précis dans notre imagination, en voici une traduction personnelle, à l'époque du lycée (Voir celle de B. Bessaïh en p. 85): «Lâ taqnat yâ khâtrî, sâ'af laqdâr / Ouat mahhal lamçâyab ed-dahr el-fânî / Mâ dâmet chedda ‘lâ man fî la‘sâr / oua lî çâbar faouq ed-douniâ hânî...Ne désespère pas, ô mon âme, accommode-toi au destin / Et diffère les malheurs éphémères / Aucun état de crise ne dure pour qui est dans la difficulté / Et qui est patient, sera heureux dans la vie.» Le fait de retrouver ces vers, je suis en joie. Boualem Bessaïh m'a remis, il nous remet tous, devant un aspect précieux de notre riche patrimoine immatériel: la poésie populaire. Son ouvrage comprend une présentation du poète et ses poèmes originaux en arabe et traduits en français. Il nous donne des éléments biographiques de Abdallah Ben Kerriou (que nous prononcions Ben Kriyoû au lycée): le poète amoureux est né en 1869, fils de bache-‘adel; il a vécu à «Laghouat, cité saharienne» dont «les habitants sont célèbres / Pour leur dignité et leur élégance.» Boualem Bessaïh rappelle le rôle de la poésie dans le Sud et son influence sur les populations des oasis et des caravanes. Il évoque les circonstances dans lesquelles se déroulaient les rencontres du poète et son public et dresse un tableau très évocateur du meddah, accompagné de la flûte (el djaouâq ou el-qaçba) chantant les poèmes de Abdallah Ben Kerriou sur le mode Ay-Ay. Les thèmes (chargés d'images, de symboles, d'allégories, d'allusions) sont variés, mais l'essentiel est consacré à l'amour de la femme: «Ce n'est pas une étoile, c'est une perle», «La gazelle effarouchée, hier s'éloignait de moi. / Â présent, elle souhaite me rencontrer»; «Je viens déposer plainte, ô Cadi de l'amour»; «Mes cheveux ont blanchi, / blanchi, par la séparation de celle / dont tintent les anneaux aux chevilles.» Je partage la conclusion de B. Bessaïh, parlant de Ben Kerriou: «Ses poèmes, qui ne parlent que d'amour, sont empreints d'une chasteté et d'une pureté remarquables», et si on voulait comparer son histoire d'amour avec celle d'autres couples célèbres de la poésie amoureuse, c'est «l'exquise histoire d'amour de Qays et de Layla qui répond mieux à son idéal passionnel et à ses frissons.» Selon Hamid Larbi, sur lequel j'ai peu d'informations (à part qu'«il est né à Alger et qu'il fut journaliste»), l'amour parle une «langue défaite». Les envolées poétiques sont d'un lyrisme qui se veut harmonieux, mais que brisent les «promesses véhémentes» de celle qui ne pouvait être qu'«une compagne indulgente de son temps». Pour le poète, parcourant les méandres compliqués dans lesquels se dilue la vie, l'amour sans l'amour est souffrance: «Quelle énergie reste-t-il? Pour vivre sans femme»; «Tu es une maladie incurable...Dans ce champ de mots / Une dose de mélodies d'Ivano Fossati / Et une autre des isfra de Si-Mohand / Ta compagnie est agréable / Ces lexies n'ont de sens / Sans / L'éloquence»; «Tu fais et tu défais mon coeur à ton gré / ton silence est comme la mort / tu coupes mon soupir qui recèle la joie». Mais en réalité, tout le rêve, tous les rêves insensés qui tourmentent le poète sont immergés chez Hamid Larbi dans «un vide reposant» qui suit l'extase que donne l'amour. On peut dire avec Hamid Larbi que l'amour rend fatalement tôt ou tard intelligent, car au bout du compte, si l'on gagne en expérience, on perd beaucoup de sa passion, et le secours ne peut venir de nulle part.
(*) Abdallah Ben Kerriou (1869-1921) Poète de Laghouat et du Sahara de Boualem Bessaïh, Casbah-Editions, Alger, 2009, 144 pages
(**) Ce champ de mots de Hamid Larbi
Casbah-Editions, Alger, 2009, 64 pages.
(Ces deux ouvrages ont été publiés avec le soutien du ministère de la Culture dans le cadre du Fonds national pour la promotion et le développement des arts et des lettres.)


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