L'appel signé par les 150 élus européens, en faveur du retour de la militante sahraouie des droits de l'homme au sein de sa patrie, n'a pas du tout été apprécié par les autorités marocaines. Rabat a vu rouge! Son ambassadeur auprès des communautés européennes a été chargé de le faire savoir. «Le Maroc rejette totalement les allégations de certains milieux qui se sont empressés de recourir à la désinformation, faisant état notamment d'enlèvement, d'arrestation, de pression ou encore de violation de la légalité internationale», a écrit Menouar Alem dans une correspondance adressée aux différentes institutions européennes, selon une dépêche rapportée par l'agence de presse officielle du Royaume, MAP. La diplomatie marocaine, visiblement à court d'argument, s'emmêle les pinceaux. Elle voit dans la démarche de cet important groupe d'élus européens, encore une fois, la main...d'Alger. La capitale algérienne a bon dos ces jours-ci. «Cette campagne est inscrite dans le cadre de la stratégie d'obstruction méthodiquement mise en oeuvre par l'Algérie et le Polisario», a ajouté le diplomate marocain. Menouar Alam pousse sa paranoïa jusqu'à voir dans cette interpellation du gouvernement marocain par les 150 eurodéputés, le résultat d'une connexion entre les responsables sahraouis et algériens. Il semble tomber des nues tout en manifestant son regret au sujet de ces «démarches des membres d'un intergroupe informel constitué au sein du Parlement européen contre le Royaume du Maroc, et qui s'affairent laborieusement, depuis plusieurs jours, à démarcher des eurodéputés sur la base d'informations erronées faisant état de mauvais traitements qu'auraient subis des citoyens marocains dans les provinces du Sud». Ce que tente d'escamoter le diplomate marocain, ce sont les visées expansionnistes du Royaume alaouite qui veut annexer par la force le Sahara occidental en foulant aux pieds la légalité internationale. Ces citoyens marocains dont il fait mention ne sont, en fait, que des Sahraouis, qui vivent dans des territoires occupés par les forces armées royales: ils symbolisent la lutte du peuple sahraoui pour son indépendance. Ils sont l'objet d'une répression féroce pour les faire renoncer à leur droit consacré par les résolutions votées par le Conseil de sécurité à disposer librement de leur destin, à travers la tenue d'un référendum d'autodétermination sous l'égide des Nations unies. Ce message délivré par Aminatou Haïdar et tous les défenseurs des droits de l'homme sahraouis, a été reçu cinq sur cinq par la communauté internationale. Les 150 parlementaires européens s'en sont fait l'écho. «Nous, parlementaires européens, appelons instamment les autorités marocaines à permettre, sans aucun délai, le retour d'Aminatou Haïdar auprès des siens», ont demandé aux autorités de Rabat les élus européens qui ont aussi souhaité la libération des sept militants sahraouis des droits de l'homme arrêtés le 8 octobre 2009 à l'aéroport de Casablanca après leur retour d'une visite qu'ils avaient effectuée dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, ainsi que celle de tous les prisonniers politiques sahraouis. L'ambassadeur marocain auprès des communautés européennes fait la sourde oreille. Il s'enfonce dans la stratégie, désormais usée, adoptée par son pays qui consiste à faire de l'Algérie sa principale cible dès que le Royaume est épinglé sur la question des droits de l'homme au Sahara occidental. Pour lui, ces militants des droits de l'homme ne sont que «des individus qui ont rencontré des responsables "de premier rang" des services de sécurité algériens et des officiels du Front Polisario. La gravité des faits qui leur sont reprochés ne permet plus aucune marge de tolérance. Des éléments de réponse édifiants peuvent certainement être trouvés du côté de l'Algérie qui prodigue son appui financier et son encadrement diplomatique et médiatique à ces actions dont les protagonistes n'en sont en fait que des exécutants». D'un trait de crayon, Menouar Alem veut élargir les frontières du Royaume et réduire le noble combat du peuple sahraoui pour son indépendance à une affaire de «délinquance politique». La réponse appropriée à ce chapelet d'injures et de calomnies est venu par le biais d'une déclaration du prix Nobel de littérature. «Il est temps que la communauté internationale, représentée par l'ONU, impose au Maroc l'obligation de respecter les résolutions onusiennes...», a souligné José Saramago.