Chef de l'Aiea pendant 12 ans, Mohamed El Baradei, qui vient de quitter ce poste, a affirmé qu'il envisagerait de briguer la présidence en 2011 si le processus électoral était démocratique. Possible candidat à la présidence égyptienne, l'ex-chef de l'Aiea Mohamed El Baradei pourrait bien devenir un opposant de poids même si ses chances de gagner sont très minces, selon des analystes. La perspective a déclenché un tir de barrage des milieux pro-gouvernementaux. Prix Nobel de la paix en 2005, M.El Baradei est en effet «un candidat sérieux, son profil en fait un présidentiable», affirme Amr el-Choubaki, du Centre Al-Ahram pour les études politiques et stratégiques. Chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) pendant 12 ans, Mohamed El Baradei, qui vient de quitter ce poste, a affirmé qu'il envisagerait de briguer la présidence en 2011 si le processus électoral était démocratique. Cette exigence, qui risque fort de s'avérer insurmontable, se double de lourdes conditions législatives qui rendent quasi impossible pour des personnes n'appartenant pas à un parti, comme c'est son cas, de déposer une candidature. Mais sans attendre une très hypothétique révision de la loi et des pratiques électorales égyptiennes, M.El Baradei a indiqué qu'il comptait s'engager en faveur de réformes. «Je suis prêt à agir de manière pacifique et organisée pour changer la constitution. Je travaillerai avec le peuple», a-t-il déclaré de Vienne, où il réside toujours, au journal al-Masri al-Yom de jeudi. La violence des attaques lancées contre lui par la presse gouvernementale et les milieux proches du pouvoir depuis plusieurs jours montrent qu'il est perçu comme un risque sérieux. Le quotidien Al-Ahram l'a ainsi accusé de vouloir un «coup d'Etat constitutionnel». Son rédacteur en chef, Oussama Saraya, a même soutenu qu'il avait la nationalité suédoise, ce que M.El Baradei dément. D'autres titres l'ont qualifié de «président importé», profitant de «l'argent des Américains», auxquels il s'est pourtant heurté à de nombreuses reprises sur les dossiers irakien et iranien. Le secrétaire d'Etat chargé des Affaires juridiques, Moufid Chehab, a déclaré que M.El Baradei aurait «tort» de penser à une candidature. Au pouvoir depuis 1981, le président Hosni Moubarak, 81 ans, n'a pas dit s'il comptait se présenter pour un nouveau mandat en 2011. Son fils Gamal, souvent présenté comme son dauphin, n'a pas non plus fait connaître ses intentions. M.El Baradei s'est distingué en tenant tête en 2002/2003 aux Etats-Unis sur le dossier des armes de destruction massives prétendument détenues par l'Irak. Il a ensuite été au premier plan dans la gestion de la crise du programme nucléaire iranien. Cette notoriété le sert d'autant plus que l'opposition égyptienne peine à faire entendre sa voix. «Il a une autre envergure» que les opposants traditionnels, juge l'analyste indépendant Issandr el-Amrani. M.El Baradei «est sérieux et représente une vraie opportunité», affirme Abdel Azim Hamad, le rédacteur en chef du quotidien indépendant Al-Chourouq. Les Frères musulmans, le plus important groupe d'opposition, traversent une grave crise interne et voient leurs membres régulièrement arrêtés. Les autres formations d'opposition restent divisées et leurs tentatives de former des coalitions finissent le plus souvent en échec. Toutefois, des membres du Wafd (libéral) ont proposé d'intégrer M.El Baradei dans l'instance dirigeante du parti afin qu'il puisse se porter candidat dans les conditions prévues par la loi. Pour Amr el-Choubaki, il pourrait aussi être, malgré les attaques des proches du pouvoir, «un artisan du consensus, capable de travailler avec les tendances réformistes au sein du gouvernement». Il devra toutefois tenter d'éviter le sort d'un autre candidat à la présidence, Ayman Nour, rival malheureux de M.Moubarak en 2005, rapidement emprisonné après avoir été accusé d'avoir falsifié des papiers.