L'exécutif a utilisé jeudi l'outil constitutionnel du «vote unique» pour écourter les débats (sur les retraites) au Sénat, provoquant la colère de l'opposition qui a dénoncé un «coup de force». Le gouvernement français est passé à l'offensive hier faisant débloquer l'accès à la principale raffinerie de la région parisienne face à la pénurie de carburant qui doit durer «plusieurs jours», quelques heures avant le vote au Sénat de la contestée réforme des retraites. Le gouvernement compte sur les vacances de la Toussaint, qui ont commencé hier soir, pour affaiblir la mobilisation contre cette réforme alors que les syndicats ont appelé à deux nouvelles journées de mobilisation nationale. La réforme, qui prévoit de reculer l'âge minimal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, devait être votée hier au Sénat. Le texte a déjà été adopté par l'Assemblée nationale et le vote final par le Parlement pourrait avoir lieu en milieu de semaine prochaine après accord des deux chambres sur un texte définitif. L'exécutif a utilisé jeudi l'outil constitutionnel du «vote unique» pour écourter les débats (sur les retraites) au Sénat, provoquant la colère de l'opposition qui a dénoncé un «coup de force». Sur le terrain, le gouvernement a fait intervenir les forces de l'ordre hier matin pour débloquer l'accès à la raffinerie de Grandpuits (près de Paris), principale source d'alimentation en carburant de la région parisienne, après un ordre de réquisition du personnel. Depuis plusieurs jours, la totalité des 12 raffineries de France sont en grève. «Ce n'est pas la raffinerie qui est réquisitionnée, c'est le stock de dépôt», a précisé le ministre de l'Energie, Jean-Louis Borloo. Le coordonnateur de la CGT (l'un des principaux syndicats français) du groupe Total, Charles Foulard, a dénoncé une «entrave au droit de grève» qui, selon lui, va créer un «électrochoc». Jeudi, Nicolas Sarkozy avait accusé les grévistes de prendre «en otage l'économie, les entreprises et la vie quotidienne des Français». Avec la grève dans les raffineries et le blocage des dépôts de carburants, «entre 20 et 21%» des stations-service étaient encore à sec hier matin, a indiqué le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo. Un retour à la normale «prendra encore plusieurs jours», a affirmé hier le gouvernement à l'issue d'une réunion en présence des principaux acteurs de la production et de la distribution de carburants, mais des mesures de rationnements ne sont «pas prévues pour l'instant», a précisé M.Borloo. D'autres actions et barrages sporadiques se déroulaient dans le reste du pays. Près de 150 manifestants ont filtré hier matin les entrées de la centrale nucléaire de Civaux (sud), laissant passer uniquement le personnel d'astreinte et de conduite de la centrale. En revanche, le trafic ferroviaire n'était que peu perturbé, avec 8 trains à grande vitesse (TGV) sur dix circulant. Du fait de toutes ces grèves, des «centaines de milliers de petites et moyennes entreprises tournent au ralenti» voire s'apprêtent à «cesser leur activité» ce qui risque de pousser «les plus fragiles» à la faillite, a dénoncé vendredi l'organisation patronale Cgpme. Le pouvoir compte sur les vacances pour voir faiblir la mobilisation chez les jeunes du fait de la fermeture des lycées. Hier matin, environ 185 lycées (sur 4300) restaient cependant «perturbés à des degrés divers», selon le ministère de l'Education. Mais, poussés par leur base, les syndicats refusent de baisser les bras et ont appelé à deux nouvelles journées de mobilisation, les 28 octobre et 6 novembre.