Désormais, le spectre d'une année blanche universitaire hante les esprits. L'Université algérienne est sur un volcan. La colère des étudiants gagne tous les campus du pays. Des milliers d'entre eux sont au front de la contestation. Grèves illimitées, sit-in, et marches font le quotidien de la communauté estudiantine ces dernières semaines. Pis, les instituts et les cités universitaires connaissent l'insécurité. La sonnette d'alarme est tirée: les franchises universitaires sont en danger. «La situation est grave, l'Université algérienne menace de s'effondrer. Nous avons organisé des sit-in pacifiques devant le ministère de l'Enseignement supérieur. A nos doléances, on a répondu par la matraque», a dénoncé Mohamed, un étudiant de l'université de Boumerdès, contacté par nos soins. La répression des sit-in estudiantins devant le ministère inquiète au plus haut point les analystes. Ingénieurs, ingénieurs d'Etat, étudiants préparant leur magister et doctorants n'ont pas échappé à la matraque. Cette crème de la société connaît, parfaitement, les rouages du syndicalisme. Elle est à l'avant- garde des manifestations pacifiques. Les contestations s'articulent autour de plates-formes de revendications pédagogiques. «Notre contestation est apolitique», a soutenu Halim, un étudiant de la Haute école du commerce (ex-INC). Les étudiants des grandes écoles et ceux des universités sont unanimes. Ils dénoncent le traitement réservé à leurs revendications par le ministère. Rachid Harraoubia a récemment promis de prendre en charge le dossier de l'équivalence des diplômes entre le système LMD et le système classique. Il a élaboré, en ce sens, un planning qui s'étale sur trois phases, du 27 février au 27 mars. Les observateurs estiment que cette initiative a toutes les chances d'échouer. Point de discorde: le décret présidentiel n°10-315 du 13 décembre 2010 qui fixe la grille indiciaire des traitements et les régimes indemnitaires et de rémunérations des fonctionnaires. Son abrogation lors du dernier Conseil des ministres est loin de calmer les étudiants. «Elle ne peut être effective (l'abrogation du décret) qu'après sa publication au Journal officiel», a précisé Farid, un étudiant de l'Ecole nationale des travaux publics. Le ministre Rachid Harraoubïa est sur la sellette, estiment les mêmes observateurs. Ils en veulent pour preuve, le mutisme dans lequel se confine la tutelle. La communication, chez le ministre, obéit à une seule règle: le silence radio. Hier encore, nos tentatives de le joindre ont été vaines. Cette attitude relève-t-elle d'une simple défaillance de communication? Les observateurs restent sceptiques sur ce plan. Ils relèvent, à ce titre, l'embarras dans lequel se trouvent Rachid Harraoubïa et ses proches collaborateurs. Pour leur part, les étudiants ont décidé de maintenir leur grève. Ils observeront un sit-in devant le ministère, mercredi prochain. Mieux, ils passent à un palier supérieur: la Présidence de la République. L'éventualité d'un rassemblement devant la magistrature suprême du pays n'est pas à écarter. La situation de l'Université algérienne se dégrade de plus en plus. Les voyants sont au rouge. Pas moins de 5 blessés ont été enregistrés au campus de Bouzaréah à Alger. Ils sont dus aux affrontements ayant opposé les membres de l'Union générale des étudiants libres (Ugel), de l'Union nationale de la jeunesse algérienne (Unja), de l'Union nationale des étudiants algériens, d'une part, et ceux du comité autonome d'autre part. Plus grave, des étudiants sont chassés de leurs cités par...des voyous! Cela s'est produit, ces derniers jours, au pôle universitaire de Tamda, à Tizi Ouzou. Le même topo est observé dans d'autres wilayas, à l'exemple de Béjaïa. Cette wilaya vit au rythme d'une colère estudiantine grandissante. Cette colère se traduit par des manifestations diverses, devenues quasi quotidiennes. L'Université algérienne bouillonne. Et si ce bouillonnement engendrait une année blanche universitaire?