«Annexez le statut des victimes du terrorisme au projet de la Réconciliation nationale.» Des centaines de familles victimes de terrorisme ainsi que les patriotes ont tenu hier, un rassemblement imposant devant l'assemblée populaire nationale, APN. Des veuves et ayants droit des victimes de terrorisme venus des quatre coins du pays, des patriotes traînant leurs anciennes blessures, amputés, mutilés et handicapés et d'autres remerciés après des années de service, sans aucune indemnisation ont dénoncé leur marginalisation et leur mise aux oubliettes par les pouvoirs publics après tant de sacrifices. Le dispositif musclé des services antiémeute, les a poussés jusqu'à la rampe en face de l'hôtel Essafir, avant de les cerner de toute part. Par moment, les contestataires en majorité des veuves tenant à investir la route pour exprimer fort leur ras-le-bol, ont réussi à forcer le cordon de sécurité. Le cas de la famille de Afir Mohamed venu de Had Chekala dans la wilaya de Relizane est plus que bouleversant: 20 membres de sa famille dont 6 enfants ont été massacrés la nuit du 4 janvier 1998 par la horde terroriste, selon un certificat de constatation et d'identification établi par la Gendarmerie nationale. Farès Mohamed, dont les parents et ses trois enfants ont été massacrés lors du même génocide ayant frappé les habitants du douar Had Chekala au début janvier 1998, perçoit en tout et pour tout 8600 DA par mois. «Cette minime pension mensuelle m' a été accordée dans le cadre d'un capital décès global estimé à 86 millions de centimes, versé au compte-gouttes sur une période limitée de 10 ans», regrette-t-il. «Aujourd'hui, je n'ai même pas de quoi m'acheter des médicaments ni de quoi payer une visite médicale», s'indigne-t-il en faisant remarquer que «les terroristes repentis ont bénéficié quant à eux d'une pension mensuelle conséquente et d'un rappel de 350 millions de centimes». Ammi Ahmed, un sexagénaire, engagé comme patriote depuis 1995, a perdu ses deux membres inférieurs suite à l'explosion d'une bombe artisanale au massif forestier de Zbarbar survenue en octobre 1997 lors d'une opération de ratissage des forces combinées. Il perçoit un petit pécule de 11.000 DA par mois avec 4 enfants à charge. Son compagnon répondant aux initiales T. F, est mutilé de sa jambe suite à l'explosion d'une bombe à Lakhdaria en 2003. «En 1995 ils étaient 250.000 patriotes, aujourd'hui leur nombre est estimé à 173 encore armés», dira le président de la Coordination nationale des patriotes. En somme, ces centaines de victimes du terrorisme s'estiment très lésées. «On est une catégorie omise, marginalisée voir laissée sur le carreau après 15 ans au service de la lutte antiterroriste», clame un groupe de jeunes patriotes remerciés en 2005 après 10 ans de service dans le maquis de Zbarbar. Abed Allal dont les deux frères aînés ont été tués par les terroristes, fait partie de ce groupe. «Je me suis engagé du côté «des hommes debout depuis 1995 sans assurance ni un salaire digne. En 2005, on m'a désarmé et remercié moi et mes 140 collègues sans aucune indemnisation», dira-t-il. «Nos corps sont mutilés et on a tout perdu sous le feu du terrorisme», «on est encore des résistants et refusant l'injustice», «annexez le statut des victimes du terrorisme au projet de la réconciliation nationale», peut-on lire sur les banderoles brandies par la foule des victimes. «On n'est pas des terroristes, on demande notre statut», «on veut nos droits ni plus ni moins» «Aldjazair hora démokratia», scandent les dizaines de veuves de victimes du terrorisme. Dans leur plate-forme de revendications, les victimes exigent entre autres, la gratuité des soins et du transport, un salaire fixe, des logements et l'augmentation des pensions des veuves.