Dans une lettre-testament adressée au mois d'avril 2009 à Barack Obama, Ted Kennedy avait demandé au président américain de soutenir le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. Les Américains, qui ont soutenu les peuples tunisien et égyptien dans leur quête de liberté, veulent spolier le peuple sahraoui de son droit à s'émanciper. La diplomatie US vient de manquer de tact. Elle a fait preuve d'un raté monumental. La secrétaire d'Etat américaine s'est de nouveau exprimée en faveur du plan d'autonomie marocain alors que six rounds de négociations informelles entre le Maroc et le Front Polisario (supervisés par Christopher Ross) n'ont permis aucune avancée notoire. «Nous avons déjà fait part de notre conviction que le plan marocain d'autonomie constitue une proposition sérieuse, réaliste et crédible, ainsi qu'une approche à même de satisfaire les aspirations des populations concernées à gérer leurs propres affaires dans la paix et la dignité», a déclaré mercredi à Washington la patronne de la diplomatie américaine, lors d'une conférence de presse animée conjointement avec son homologue marocain, Taieb Fassi Fihri. Exit l'option de la tenue d'un référendum qui permette au peuple sahraoui de s'exprimer librement quant à son avenir comme le stipule la résolution 1920-qui doit expirer dans un mois-votée par le Conseil de sécurité le 30 avril 2010. Une prise de position qui trahit l'esprit de la lettre-testament laissée par le sénateur démocrate du Massachusetts décédé le 25 août 2009. «Alors que vous entamez votre mandat, nous vous demandons instamment ainsi qu'à votre administration d'agir pour soutenir le peuple du Sahara occidental dans son droit à l'autodétermination à travers l'organisation d'un référendum libre, juste et transparent», avait demandé Edward M. Kennedy, quatre mois avant sa disparition, au mois d'avril 2009, dans une lettre adressée au président des Etats-Unis et cosignée par de nombreux sénateurs dont Russel D. Patrick J. Leahy, James M.Inhofe et Feingold. «Le peuple sahraoui souffre depuis que les forces militaires marocaines ont pris le contrôle de la majorité de ce territoire. C'est dans l'intérêt de notre pays de s'assurer que cette question soit traitée avec équité, conformément aux principes internationalement reconnus et de manière à permettre au peuple sahraoui de choisir son avenir politique et économique», poursuivent dans leur missive le vieux Lion et ses compagnons. Il faut rappeler que lors de l'élection présidentielle de 2008, Ted Kennedy avait soutenu la candidature de Barack Obama contre celle...d'Hillary Clinton. La chef de la diplomatie américaine veut elle une revanche post mortem? Cela y ressemble. D'autant plus qu'elle vient de récidiver. «Il s'agit d'un plan, qui, vous le savez, a été amorcé sous l'administration Clinton. Il a été réaffirmé sous l'administration Bush et il demeure la politique des Etats-Unis sous l'administration Obama... Je ne veux pas qu'il y ait de doute, dans la région ou ailleurs, au sujet de notre politique qui demeure inchangée», a confié Hillary Clinton dans une interview accordée à l'agence de presse officielle marocaine MAP, en marge de la sixième réunion ministérielle du Forum pour l'Avenir, qu'avait abrité la ville de Marrakech du 2 au 3 novembre 2009. Plus d'une année plus tard elle revient donc à la charge dans un contexte géopolitique explosif. La sortie médiatique de l'ex-première Dame des Etats-Unis intervient au moment où les américains investissent le terrain au Maghreb qui est en proie à des mouvements de contestation sans précédent. La révolution de Jasmin en Tunisie, la crise libyenne, marches au Maroc, revendications en Algérie... La diplomatie américaine cafouille en Afrique du Nord. Les positions diffèrent d'un responsable à un autre en ce qui concerne le conflit du Sahara occidental. Philipp Crowley, porte-parole du département d'Etat, a rappelé le 18 janvier 2011 lors de son briefing quotidien que les USA continuaient de soutenir le processus des Nation unies afin «d'aider les deux parties en conflit, le Front Polisario et le Maroc, à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l'autodétermination du peuple du Sahara occidental». Une déclaration qui est aux antipodes de celle de la secrétaire d'Etat. Interrogé jeudi dernier sur la sortie médiatique de la secrétaire d'Etat US, l'ambassadeur des Etats-Unis à Alger s'est montré moins prolixe et plus prudent. «Nous avons toujours encouragé les efforts de l'ONU et de son envoyé spécial. Nous encourageons également les parties à dialoguer et à coopérer», a souligné David Pearce. La politique étrangère américaine incarnée par Hillary Clinton avance en terre inconnue au Maghreb. Elle donne l'image d'une diplomatie qui a du mal à accorder ses violons.