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De quoi sera fait le 1er mai?
LA PROTESTATION S'ETEND À DE NOMBREUX SECTEURS
Publié dans L'Expression le 28 - 04 - 2011

Le printemps des débrayages s'étend à l'ensemble des secteurs d'activité. Même les syndicats affiliés à l'Ugta sortent leurs griffes.
La Fête des travailleurs s'annonce sous des auspices jamais connus jusqu'ici. En effet, le pic des manifestations a, depuis janvier à ce jour, atteint 330 actions menées à travers le territoire national. Un record jamais enregistré qui, pourtant, ne tient pas compte des manifestations à caractère politique.
En effet, le prochain 1er mai s'annonce, d'ores et déjà, sous les couleurs de la protestation. Les travailleurs des différents secteurs d'activité comptent faire de la journée du 1er-Mai, fête des travailleurs, «une journée de protestation unitaire». Les syndicats des fonctionnaires (wilaya, daïra, APC) et ceux représentant les services de certains secteurs, de l'agriculture, l'équipement, la construction et les affaires sociales envisagent de passer à l'action. Les travailleurs des ministères de l'Education et de l'Enseignement supérieur, des Moudjahidine, et des Affaires religieuses comptent observer un mouvement de contestation devant le Palais du gouvernement. Il s'agit pour eux de militer en faveur de la satisfaction de leurs revendications portant essentiellement sur leurs droits socioprofessionnels.
Les contestataires affirment qu'ils ne sont plus satisfaits par un discours fait de promesses. Ils avertissent, d'ores et déjà, que si les autorités campent encore sur leurs positions, un sit-in sera organisé, en plus de celui du 1er mai, le 19 mai prochain devant le Palais du gouvernement ou devant la Présidence. Une question se pose alors: quelle sera la suite que les syndicats pourront donner à leur mouvement de protestation, si leurs revendications demeurent insatisfaites? Un communiqué du Snapap a rassemblé dans une liste 49 revendications. Ces dernières s'articulent autour des droits syndicaux et socioprofessionnels. Le document du Snapap souligne que les travailleurs sont privés de l'exercice de l'activité syndicale. Le syndicat dit que les travailleurs des différentes corporations sont opprimés et leurs droits bafoués. Ils seraient même réduits à l'exploitation et maltraités. D'où l'urgence pour les pouvoirs publics d'agir et de prendre en considération les doléances des travailleurs.
Les multiples promesses avancées par le gouvernement en matière d'emploi, de logement et la hausse des salaires ou la définition d'un statut, l'amélioration des conditions de vie et du pouvoir d'achat des citoyens semblent produire peu d'impact sur la population. Mais elles accentuent la frustration sociale. Résultat: cette protestation sociale, s'inscrivant dans la continuité, tend, à l'évidence, à constituer la manifestation d'une crise politique majeure, qui secoue le pays depuis des décennies. Elle renseigne ainsi sur l'échec des différentes stratégies de développement mises en oeuvre dont les conséquences ont atteint le tissu social. Ces manifestations entraînent par conséquent d'autres catégories sociales. On constate même un effet boule de neige dans les manifestations. En d'autres termes, des chômeurs prennent ainsi part à des marches et manifestations organisées par d'autres corporations, en l'occurrence, les syndicats, les étudiants, etc. Un autre fait à relever et non des moindres; l'expression de la colère des travailleurs et des autres catégories sociales est restée pacifique.
Néanmoins, nombre d'observateurs ont tiré la sonnette d'alarme quant au risque d'une explosion sociale. «Les évènements de janvier dernier, soldés par 5 morts et des dizaines de blessés, en sont un signe fort», a fait savoir Hocine Abdellaoui, spécialiste des mouvements sociaux. Les syndicats dénoncent énergiquement l'absence de dialogue et le fait que les pouvoirs publics fassent la sourde oreille en dépit des appels de détresse lancés régulièrement par les travailleurs exerçant dans les différents secteurs d'activité. Il convient de signaler également que même les autres corporations ayant cru que leurs problèmes étaient effectivement pris au sérieux par les pouvoirs publics, à la suite des différentes rencontres, reviennent à la charge. Elles comptent ainsi relancer leur mouvement de débrayage à partir du 1er mai prochain pour dénoncer les volte-face des pouvoirs publics dans la gestion de leurs problèmes qu'elles croyaient résolus. C'est le cas pour le secteur de l'éducation.
Adjoints d'éducation, agents de la police communale, anciens de l'ANP et de la police, victimes du terrorismes, organisations des droits de l'homme, partis politiques, l'association SOS disparus, journalistes et syndicalistes se donnent rendez-vous pour sortir dans la rue et faire du mois de mai une occasion pour la protestation. En plus des travailleurs, les chômeurs se mettent aussi de la partie. C'est dire que le printemps des débrayages s'étend sur l'ensemble des secteurs d'activité. Même les syndicats affiliés à l'Ugta sortent leurs griffes. Les travailleurs de l'administration prévoient un débrayage dès le 12 mai.
Les postiers sont aussi sur les dents. Tout ce beau monde veut plus d'argent. Les travailleurs ne sont plus satisfaits de leurs salaires. L'augmentation du coût de la vie a laminé leur pouvoir d'achat. Les hausse répétitives ne sont pas faites pour calmer leurs ardeurs.
Les subventions non plus, d'ailleurs, rien que pour le dispositif d'aide à l'emploi, 180 milliards de dinars ont été dépensés. La loi de finances complémentaire de 2011 va créer un chapitre dédié spécialement à la prise en charge des augmentations salariales.
C'est dire enfin que la journée du 1er Mai n'est pas encore synonyme d'une fête pour les travailleurs algériens.
Elle est plutôt une «journée de contestation unitaire» pour tenter d'obtenir des hauts responsables du pays un minimum de Smig de dignité humaine et une satisfaction de leurs revendications, pourtant élémentaires et fondamentales. Cela exprime enfin, selon Hocine Abdellaoui, cette frustration que partage la société dans toutes ses profondeurs.


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