Le document irakien sur son désarmement ne semble pas avoir convaincu. D'aucuns estiment même que Bagdad a échoué à son examen en n'étant pas décisif, ou en n'ayant pas su se montrer convaincant, sur son désarmement. En tout état de cause, pour Washington la cause semble bien entendue qui affirme que l'Irak est en «violation patente» avec la résolution 1441 de l'ONU. Ce qui, autrement dit, autoriserait ce pays à envisager la frappe militaire dont il menace l'Irak depuis des mois. De fait, le destin de l'Irak était, jeudi, suspendu aux appréciations que donnaient, en première lecture, les chefs de la Mission d'inspection, de contrôle, et de vérification des Nations unies, (Cocovinu), Hans Blix, et celui de l'Agence internationale de l'énergie atomique, (Aiea) Mohamed El-Baradei, sur la déclaration, alors que les experts onusiens sont sur place depuis près d'un mois. Le moins qui puisse être dit est que ces derniers ont relevé des manquements qu'ils ont portés à l'attention du Conseil de sécurité. Outre le fait que la déclaration ne présentait, selon Hans Blix, rien de nouveau, ce dernier relève en revanche au moins trois manquements, selon lui, de Bagdad à ses obligations, en donnant trois exemples à l'appui qui prouveraient, selon le chef de la Cocovinu, que l'Irak n'aurait pas tout dit. Exemples techniques qui, en fait, ne prouvent pas grand-chose se résumant à de simples présomptions. Hans Blix, dont les inspecteurs ne semblent pas disposer de toutes les informations nécessaires, a, toutefois, dans un entretien avec la BBC, mis l'accent sur le fait que «Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne (principaux accusateurs de l'Irak) pourraient nous dire quels sont les sites où ils sont convaincus que l'Irak garde certaines armes de destruction massive». Apostrophant Washington et Londres il dira: «Si vous êtes sûrs que les Irakiens ont quelque chose qu'ils n'ont pas divulgué, alors la déclaration n'est pas complète. La question est: en avez- vous les preuves? La Grande-Bretagne dit oui, les Etats-Unis aussi, Nous, nous disons que nous ne savons pas.» C'est en fait le dilemme auquel est confronté l'ONU, l'Irak dit qu'il ne dispose plus d'armes interdites, mais semble incapable de le prouver au moment où les Etats-Unis affirment détenir des preuves, mais refusent de les rendre publiques. Faut-il frapper militairement l'Irak sur les simples affirmations de Washington? Voilà qui, dès lors, serait un précédent dangereux, puisqu'il suffirait que les Etats-Unis affirment une chose pour que les reste du monde doive s'incliner et s'exécuter. De fait, le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, a énuméré quatre priorités qui semblent être autant de directives en direction du Conseil de sécurité. C'est en fait un programme de travail que Washington assigne autant aux inspecteurs onusiens qu'au Conseil de sécurité lui-même, alors que l'on pouvait, à tout le moins estimer, -ne serait-ce que dans les formes afin de préserver ce qu'il reste de crédit à l'ONU, que ce sont les Nations unies qui sont maîtres d'oeuvre dans le désarmement de l'Irak. Il apparaît bien qu'il n'en est rien et que le seul décideur, aujourd'hui affirmé, ce sont les Etats-Unis. Du coup quelles que soient les preuves que pourra faire valoir Bagdad quant à son désarmement, pour Washington elles resteront définitivement incomplètes et inopérantes, la Maison-Blanche ayant une fois pour toutes décidé de donner, - en grandeur nature, quitte à détruire un pays-, l'exemple dissuadant d'autres Etats à emprunter la voie suivie par l'Irak. Selon l'ambassadeur colombien, président en exercice du Conseil de sécurité, ce dernier se réunira dans le courant du mois de janvier pour entendre l'ensemble de ses membres après étude de la déclaration irakienne. Un sursis qui semble bien mince pour l'Irak, aujourd'hui directement sous la menace de l'épée de Damoclès américaine.