“L'insuffisance, voire l'absence dans beaucoup de cas, du contrôle technique des véhicules mis en circulation dans notre pays est à l'origine, pour un grand pourcentage, des accidents mortels sur nos routes.” Cette déclaration a été mise en avant par un spécialiste en la matière, un technicien de contrôle technique des véhicules de son état et gérant d'une des douze agences exerçant à Tizi Ouzou, sise à Oued Aïssi (6 km à l'est de la ville de Tizi Ouzou), M. Arezki Boukendour en l'occurrence. Pour notre interlocuteur, qui élabore chaque année, depuis 2004, des statistiques dans ce sens et qu'il soumet à l'Enacta (Etablissement national de contrôle technique automobile), “la mission d'une agence de contrôle technique des véhicules est surtout la participation de cette dernière à la prévention dans la sécurité routière, notamment par une vérification adéquate et méthodique du fonctionnement des “organes” de sécurité de tout véhicule”. Ce contrôle doit être effectué, selon M. Boukendour, par un personnel qualifié, dûment habilité et avec des équipements que les normes exigent. L'objectif fondamental d'un contrôle technique est de réduire autant que faire se peut la mortalité routière qui ne cesse d'endeuiller quotidiennement ces derniers temps des familles algériennes. Plus de 4 000 morts enregistrés annuellement en Algérie dans les accidents de la circulation et dont la cause, en majorité, reste la défaillance technique des véhicules, l'excès de vitesse évidemment, l'absence de contrôle policier, le tout conjugué au mauvais état des routes, à l'absence par endroit de la matérialisation des chaussées, et, le plus fréquent, au non-respect de la réglementation routière. D'autres facteurs ne sont pas absents de ces hécatombes aux conséquences sans commune mesure en matière de préjudices aussi bien pour les parents de victimes, les victimes elles-mêmes (blessées graves, paralysées…), qu'aux organismes d'assurance et de sécurité sociale (Cnas). Le remède ou du moins une partie de ce remède préconisé, c'est de mettre en œuvre, voire “imposer” un contrôle technique efficace et de qualité au niveau des agences, ainsi qu'un service pénal juste, à même de condamner tout auteur d'accident (chauffard), ou de fraude (pour les agences de contrôle), une amélioration des infrastructures, la signalisation digne de ce nom… Notre interlocuteur relève également dans son analyse la non-fiabilité des statistiques des accidents de la circulation établies par les services de sécurité, car effectuées sans équipements appropriés, sachant que ces derniers ne se basent le plus souvent que sur des témoignages et des suppositions dans lesquels le facteur humain est toujours mis en évidence comme principale cause. Or, s'il est référé aussi aux importants défauts lors des contrôles des véhicules, l'on aurait découvert que le mauvais état des véhicules en est une cause non négligeable. Dans les enquêtes réalisées par ce contrôleur technique, il ressort que les mauvais freinages et suspensions du véhicule, qui présentent des risques considérables, sont souvent les principales causes des accidents mortels sur nos routes. Et dire que ces anomalies sont fréquemment relevées même sur des véhicules neufs, malheureusement. Et dans ces cas de figure, ce sont les propriétaires, eux-mêmes, de ce type de véhicules qui négligent le contrôle, car partant avec un esprit “confiant et convaincu” du “parfait” état de leurs voitures. Or, il a été relevé que beaucoup de véhicules neufs présentent de graves et dangereuses anomalies qui ne sont pas sues, car non apparentes sans un contrôle technique avec des équipements fiables. Dans ses statistiques, ce technicien a établi que le déséquilibre dans le freinage constaté sur des véhicules contrôlés annuellement (véhicules particuliers, de transport de marchandises et de transport en commun de personnes, taxis…) est d'un taux moyen de 33% alors que celui de la dissymétrie (défaut de suspension) est, lui, de 37,57%. Sur ce, l'on peut affirmer qu'un véhicule léger sur trois peut être déclaré dangereux sur la route, selon M. Boukendour, pour qui, un véhicule de transport de voyageurs (taxi ou de transport en commun de personnes) présentant un défaut de freinage de 35% reste inadmissible à la circulation. Il note dans ses documents que des défaillances importantes sont relevées sur les freinages et les suspensions des véhicules dits neufs de transports de personnes et de marchandises, puisque un taux de 12% de déséquilibre des freins et 20% de dissymétrie de la suspension est affiché sur une diversité de véhicules contrôlés par son agence. Son constat est encore plus inquiétant pour la catégorie de véhicules de transport de marchandises ayant plus de 10 ans d'âge, soit 52% en défaut de freinage et 64% de dissymétrie de la suspension. Du point de vue de M. Boukendour, presque toutes les marques de véhicules présentent toujours des défauts de freinage et de suspension, et ce, quelles que soient les dates de leur mise en circulation. Pour réduire “la mortalité routière”, ce technicien en la matière suggère “l'observation de la rigueur dans la réglementation, le contrôle, la sanction, la gestion du trafic routier, la sensibilisation, l'amélioration de l'état des infrastructures, etc., ceci en imposant aux agences de contrôle à se donner de la peine pour vérifier et rapporter les vrais résultats des tests effectués, tout en exhortant l'Enacta à veiller en vue de dénicher l'éventualité de toute tricherie de la part des agences. Car, malheureusement, ces tricheries sont souvent volontairement admises, voire encouragées, par un grand nombre d'usagers soumettant leurs véhicules au contrôle. Cette réalité nous a été démontrée moult fois par des agents de contrôle en découvrant des PV vierges sur des véhicules en état de véritable épave”, déplorera M. Arezki Boukendour. Salah Yermèche