Au-delà de la cérémonie d'investiture historique, le nouveau président des Etats-Unis est attendu comme un “superman” en mesure de résoudre d'un coup de baguette magique toutes les crises qui secouent le monde. Ce trop-plein d'espoir ne risque-t-il pas de déboucher sur un grand désenchantement ? À voir les réactions positives suscitées par son entrée à la Maison-Blanche ce mardi, Barack Obama semble être Le Messie tant attendu pour remettre le monde sur les rails. Il faut dire qu'il a fait tellement d'annonces dans son discours inaugural mardi soir, qu'il donne l'impression de posséder des solutions miracles à tous les maux de l'Amérique en particulier et de l'humanité de manière générale. Rares ont été les capitales, si l'on excepte Moscou, Téhéran ou la Havane, à afficher une certaine prudence, à ne pas voir en Obama l'homme de tous les défis. L'espoir ne semble pas avoir de limites, tant les applaudissements fusent de partout, y compris de parties habituées à critiquer l'Amérique à la moindre occasion. Même les islamistes pakistanais, connus pour leur haine envers Washington, ont salué les annonces de Barack Obama, notamment celle relative aux relations qu'il envisage d'établir avec les musulmans. Ainsi, le parti pakistanais Jamaat-i-Islami (JI) a salué, hier, sa déclaration d'adopter une “nouvelle approche” envers le monde musulman “basée sur l'intérêt et le respect mutuels”. “Nous apprécions beaucoup cette proposition”, a déclaré à la presse Khurshid Ahmed, vice-président du parti JI, réputé pour son opposition à la politique de l'ex-Administration américaine. Certes, nul ne peut mettre en doute dès maintenant les intentions de Barack Obama, tant que celles-ci ne sont pas suivies d'actes, mais est-il en mesure de tout changer comme il le promet à tout bout de champ, depuis le lancement de sa campagne électorale ? Il s'agit surtout de savoir s'il aura les coudées franches pour réaliser tout ce qu'il compte entreprendre comme opérations. Avec tous les lobbies existant aux Etats-Unis et les interférences qui peuvent émaner du Congrès américain, bien que les démocrates détiennent la majorité dans les deux chambres, il n'est guère évident qu'il puisse agir à sa guise. Par ailleurs, les crises héritées de George Bush sont tellement nombreuses, dont certaines nécessitent des solutions urgentes, notamment celle des finances, que Barack Obama devra faire preuve d'une grande activité pour espérer satisfaire les attentes uniquement. Il ne faut pas être grand clerc pour savoir que la crise économique mondiale, qui affecte particulièrement les Etats-Unis, nécessitera une attention spéciale qui peut durer dans le temps parce que les prévisions des spécialistes en la matière ne laissent pas entrevoir d'évolution dans l'immédiat, bien au contraire, la récession n'est guère écartée. Quant à la politique étrangère américaine, tout indique que la tâche s'annonce des plus ardues au vu des conflits armés légués par George Bush en Afghanistan et en Irak, sans oublier bien sûr la grande rivalité avec la Russie, laquelle revenue en force grâce à l'amélioration de son économie, ne laissera certainement pas le champ libre à l'Administration Obama, à commencer sur le dossier du bouclier antimissiles US en Europe de l'Est, dont Moscou ne veut pas entendre parler. C'est dire que ce ne sont pas les dossiers chauds qui manqueront sur le bureau du nouveau patron de la Maison-Blanche. À partir de là, il y a lieu de savoir également, si à force de vouloir traiter tous les dossiers à la fois et rapidement, le nouveau locataire du bureau ovale ne va pas disperser ses efforts dans tous les sens sans parvenir à l'essentiel. Il faut peut-être attendre au-delà des cent premiers jours d'Obama et voir les premiers résultats pour être fixé. Merzak Tigrine