À environ 2 000 kilomètres d'Alger, la région de Tamanrasset souffre depuis longtemps d'une véritable crise d'eau. Si le gouvernement a fait de l'amélioration de l'alimentation en eau potable des foyers une de ses priorités après le rétablissement de la paix, il n'en demeure pas moins que cette opération nécessite des moyens beaucoup plus colossaux dans le sud du pays. Le pari est, certes, difficile mais pas impossible. La dernière fois qu'il s'est rendu à Tamanrasset, c'était à l'occasion de la campagne électorale pour la présidentielle du 9 avril en sa qualité de directeur de campagne du candidat indépendant, Abdelaziz Bouteflika. Cette fois-ci, M. Abdelmalek Sellal reprend sa casquette de ministre des Ressources en eau pour aller inspecter lui-même les travaux de ce projet cher au président de la République. En l'occurrence, ramener de l'eau potable pour Tamanrasset et ses environs. Le gouvernement, qui a inscrit cette opération sous le sceau de l'urgence, a débloqué une enveloppe de 1,3 milliard de dollars. Décontracté et souriant, Abdelmalek Sellal, accompagné des responsables du projet, ainsi que de Daho Ould Kablia, ministre délégué chargé des Collectivités locales, s'est entretenu avec les responsables du groupement chinois chargé de la réalisation du projet. Première halte de la délégation ministérielle, le réservoir terminal de Tamanrasset à Tillassi, doté d'une capacité de 50 000 m3 et dont l'achèvement est prévu pour mars 2010, selon les responsables de la société chinoise CGC. Sur place, Abdelmalek Sellal n'a pas caché sa satisfaction. “Nous sommes satisfait du travail, continuez sur ce rythme. Je vois que vous avez bien travaillé, et si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à m'en faire part”, a-t-il lancé à l'adresse des travailleurs chinois. Même lorsqu'il s'agit de détendre l'atmosphère, le ministre ne manque pas d'humour. “Terminez le travail et pour cela, s'il faut vous approvisionner de brochettes de chats, ce sera fait”, a-t-il plaisanté. Cette halte durera à peine un quart d'heure et la délégation reprend la route, direction Aïn M'guel. Cette fois, il s'agit d'inspecter la pose des canalisations. Un travail titanesque qui n'a pas laissé M. Sellal indifférent, ce qui ne l'a pas empêché d'insister sur le respect des délais. “Cela se passe plutôt bien et la pose des canalisations avance de manière relativement correcte. Il y a aussi un rééquilibrage du projet qui a été fait dans l'étude, c'est pour cela que nous avons demandé à l'entreprise de renforcer ses équipes pour être au rendez-vous”, a-t-il insisté. Le tronçon In Salah-Arak, d'une longueur de plus de 350 km, est presque terminé, alors que celui reliant Arak à la ville de Tamanrasset (environ 400 km) n'a pas connu de grandes avancées en raison d'un terrain hostile et souvent rocheux, et de la soudure des canalisations qui se fait uniquement pendant la nuit à cause d'une température très élevée le jour. Après deux haltes à Taourirt et à Tit, la délégation arrive à In Iker, connue beaucoup plus pour avoir subi treize essais nucléaires, dont deux ont connu des fuites de radioactivité. Sur place, le ministre a mis l'accent sur la nécessité de prendre toutes les mesures de précaution et de protection des travailleurs contre les risques de radioactivité au niveau de cette région d'In Eker. Cela dit, il n'existe aucun risque à ce que l'eau soit affectée par cette radioactivité. Il y a un suivi permanent dans ce sens par un bureau d'études français, en collaboration avec le commissariat de l'énergie atomique. De leur côté, les Chinois ont profité de la présence du ministre pour lui soumettre une demande de renfort de leurs équipes avec une main-d'œuvre étrangère qualifiée. “Comme je vous l'ai dit, il est très important de terminer les travaux comme demandé par le président de la République. Pour ce qui est de la main-d'œuvre étrangère, vous me soumettez votre demande dans deux jours et je veillerai personnellement à ce que cela soit fait, mais, vous, de votre côté, il faut accentuer les efforts et travailler par deux brigades et sans interruption”, a-t-il insisté. Le ministre a d'ailleurs improvisé un point de presse à la fin de sa visite de travail de retour à Aïn M'guel. Faisant le point sur le projet, M. Sellal, dira : “C'est un projet qui a démarré il y a maintenant plus d'une année, il devrait en principe s'achever à la fin de l'année 2010. À l'allure où vont les travaux actuellement, je pense qu'en matière de pose de canalisations, nous sommes largement dans les temps. En matière de champs de captage, les travaux sont terminés, reste le point le plus difficile, actuellement, à savoir les stations de pompage. Le président de la République a lui-même insisté pour que cela se fasse au dernier trimestre 2010, et je pense que cela va se faire, bien qu'il y ait des difficultés.” La protection de l'environnement a été aussi au centre des intérêts du ministre. “C'est une région très difficile par son caractère rocailleux et on a voulu réaliser ce projet tout en préservant l'environnement. Le grand château d'eau de 50 000 m3 va épouser carrément la montagne, il y sera carrément incrusté. C'est pour cela que le travail est encore plus difficile. Je pense que les huit entreprises qui interviennent ici mèneront à bout ce grand projet. Je pense que nous serons au rendez-vous, c'est une instruction du président de la République de terminer le projet avant 2011.” Enfin, pour la sécurité des travaux soulevés par un des responsables chinois, M. Sellal a rassuré : “Concernant la sécurité des travaux, l'ADE est chargée d'engager des sociétés de sécurité même privées, à l'exemple de Secur, et je suis convaincu que sur le plan des réalisations, il n'y aura aucune incidence.” Par ailleurs, M. Daho Ould Kablia a annoncé, en marge de cette visite d'inspection, la création d'un nombre de petites agglomérations tout au long du tracé du projet. Il s'agit de petits pôles urbains dont le noyau dur sera constitué à partir des stations de pompage placées sur le linéaire du transfert ainsi que les localités avoisinantes, comme In M'guel, Arak, Tit et In Eker, a-t-il précisé, ajoutant que la mise en œuvre de ce plan est inscrite dans le quinquennat prochain. C'est dans une atmosphère décontractée que le ministre des Ressources en eau a joint l'utile à l'agréable, rassurer, mais aussi mettre chaque partie devant ses responsabilités, car il y va, dira-t-il, du développement de la région. “Nous vivons des moments difficiles au Hoggar, il n'y a pas assez d'eau… Heureusement qu'il a plu hier”, a-t-il conclu avec une touche d'humour. C. M.