De nombreux foyers naturels de peste ont été répertoriés de par le monde et enregistrés comme tel par l'OMS qui signale dans son manuel de la peste que “la distribution aujourd'hui de la maladie coïncide avec la répartition géographique de ses foyers naturels…” Or, jusqu'ici à Oran, la situation qui préoccupe les spécialistes depuis l'apparition, début juin, de 10 cas de peste, c'est que l'on ne retrouve pas les données et autres critères nous permettant de dire qu'il existerait à Kehaïlia un foyer naturel de peste qui se serait réveillé pour des raisons encore inconnues. Tout d'abord, l'Algérie n'a jamais été répertoriée comme un pays de foyers naturels de peste. M. Bertherat, chef de la mission de l'OMS, avait déclaré à ce sujet que les derniers cas de peste recensés en Algérie remontent aux années 1950 et qu'il s'agissait de cas “importés”. Certes, la peste est une maladie des rongeurs sauvages ; leurs puces peuvent, dans certains cas, la transmettre à des rongeurs domestiques et à l'homme. Mais le rongeur domestique n'y survit pas. Jusqu'ici, les épidémiologistes et entomologistes n'ont pas constaté à Kehaïlia ou même à Aïn Témouchent une hécatombe de rongeurs domestiques. Qui plus est, ça et là, l'on nous signale des cas suspects à Saïda, Chlef, Aïn Témouchent et à la périphérie d'Oran. Le ministère s'en tient au bilan provisoire de 10 cas avérés. Le professeur Kellou, directeur central de la prévention au ministère de la Santé, que nous avons contacté par téléphone, nous fait néanmoins remarquer que “les mesures de prévention qui ont été prises, en mettant sous chimio prophylactique tous les sujets exposés et ceux, bien sûr, atteints, ont certainement contribué à limiter les cas de peste”. Et d'ajouter : “Les opérations de désinsectisation nous ont permis de maîtriser la situation. D'ailleurs, les derniers cas qui avaient été signalés ne se trouvaient pas dans les zones traitées, mais à la périphérie...” Notre interlocuteur nous signale que, pour l'heure, les entomologistes algériens et leurs collègues de l'OMS poursuivent leurs investigations et que l'hypothèse de peste importée n'est pas écartée. C'est dans ce cadre que des rats ont été capturés au niveau du port d'Oran et que d'autres vont l'être le long de l'autoroute empruntée par les camions qui transportent du blé vers les silos et autres minoteries de la région de Tafraoui. Des puces ont également été trouvées et les analyses vont être menées à l'annexe de l'institut Pasteur. Des résultats pourront être possibles d'ici une semaine et donc un début de réponse pouvant expliquer cette situation à Oran. À un autre niveau, il est à signaler que la peste a, d'une certaine façon, fait revivre chez les citoyens des réflexes civiques puisque, dans certaines cités périphériques, les habitants ont d'eux-mêmes décidé de nettoyer leur environnement immédiat. Il faut espérer que cela ne durera pas le temps d'un été et d'une peste. F. B.