Souad Massi est une chanteuse algérienne dont l'étoile brille au firmament. Auteure, compositrice et interprète, l'artiste a réussi à décrocher une place au soleil et à gagner l'amour du public grâce à son talent, à sa voix douce et mélancolique et à des rencontres artistiques. Présente à Timgad pour assurer la première partie de l'avant-dernière soirée du festival, Souad Massi a répondu à nos questions, évoquant ainsi ses trois albums, ainsi que sa relation avec la musique et l'Algérie. Liberté : Nous avons constaté que vous étiez un peu angoissée avant de monter sur scène. Le public a apprécié votre prestation. Tout est bien qui finit bien donc… Souad Massi : C'est vrai que j'étais angoissée, surtout que le public ne me connaît pas bien. Finalement, tout s'est déroulé merveilleusement bien. Le public m'a écoutée, a dansé et nous a applaudis, moi et mes musiciens... C'est formidable! Vous avez un visage heureux et angélique, mais ceci contraste avec vos chansons qui sont empreintes de mélancolie et de nostalgie. Vos textes sont tristes, notamment Kain Li ibki ala Zahrou, Wach Nahder Ouach Enkhali, Khalouni Nebki,Dania rahi Dour… Comment expliqueriez-vous ce contraste ? D'abord, les titres que j'ai interprétés sont des chansons extraites de mes trois albums : Raoui (2001), Deb (2003) et Mesk-ellil (2005). Elles résument ce que j'ai vécu, ce que je ressens ou ai ressenti au moment où je les ai écrites. Par exemple, dans l'album Raoui, la plupart des chansons je les ai écrites lorsque j'étais à Alger. J'ai raconté ma ville ainsi que des choses qui m'ont affectées, marquées et touchées. D'ailleurs, je ne pourrai pas les dire autrement. Je me suis inspirée du vécu et c'est la situation de l'Algérie de l'époque qui m'a inspirée. Ces souvenirs tristes et amers, une fois écrits et chantés, sont comme une thérapie. En fait, nous avons vécu un cauchemar et d'ailleurs, chaque fois que je retourne en Algérie, ces souvenirs rejaillissent en moi. Ma musique traduit la douleur d'un passé difficile à oublier. Vous album le plus personnel est Raoui. D'ailleurs, vous avez composé la chanson Raoui à l'âge de 17 ans. Pouvez-vous nous parler de cet album, tout particulièrement ? La chanson Raoui ,je l'ai effectivement composée à l'âge de 17 ans. J'avais une jeune sœur à qui ma mère racontait des contes et chantait des berceuses. Personnellement — je ne le cache pas — j'étais un peu jalouse de l'affection et l'attention qui lui étaient accordées. J'étais timide et je ne pouvais pas dire à ma mère de me raconter des histoires, mais ces contes me permettaient de rêver et de voyager. Alors j'ai écrit cette chanson de Raoui pour dire que, même quand on est grand, on a besoin de contes pour échapper à notre quotidien, y trouver refuge et continuer à vivre. Dans votre album Mesk Ellil par contre, il y a une maturité qui s'installe et vous revendiquez clairement votre algérianité… Dans l'album Mesk Ellil, j'ai beaucoup chanté Alger et j'ai beaucoup écrit sur ma famille. Je pense aux chansons Dar Djeddi et Ma nen'sa Asli. Il y a six titres dans l'album, qui n'évoquaient que cela. Je suis nostalgique et bouleversée par la distance, mais en même temps, cette distance me permet de revenir me ressourcer auprès des miens. Je reste en contact avec mon pays, ma famille et mes amis, qui représentent de véritables repères. Pensez-vous revenir définitivement au pays un jour ? Je suis en Algérie (rires). Pour y vivre ? Je suis perpétuellement en voyage. C'est mon travail ! Même en France, je suis toujours en voyage. Lorsque je ne travaille pas, je prends ma guitare, je monte à la terrasse et je joue. Comment écrivez-vous vos chansons ? Les paroles sont toutes simples, ce n'est pas compliqué…je n'ai rien inventé. J'écris ce qui me vient à l'esprit d'une manière spontanée. Et toutes les chansons que j'interprète sont mes compositions. Elles sont un mélange de plusieurs styles de musique : du folk, du classique, du chaoui, du chaâbi. En fait, je puise dans le patrimoine algérien qui est à mon sens très riche. Je ne fais pas dans la chanson traditionnelle, mais je me retrouve beaucoup plus dans le style chaâbi. Je l'adore, les autres styles, je ne les maîtrise pas bien. Êtes-vous sur le projet d'un 4e album? Je suis en train de le préparer. Pour l'instant, je fais des maquettes, mais en tout cas, il sera beaucoup plus orienté vers le rock. B. B.