S'il fallait un jour chercher un symbole pour la cuisine du Ramadhan, c'est la zlabiya qu'il faudra choisir. Elle est là bien avant que le fumet des chorbas n'investisse la rue. Plusieurs jours avant la période de jeûne, son parfum se répand dans l'air. Elle est perçue comme un augure de douceur. Très prisée, elle reste liée à l'image de la famille. Quel petit bonheur pour les enfants dispensés du siyam lorsqu'elle leur était servie froide au petit-déjeuner. C'était avant les crèmes à tartiner ! Concurrencée aujourd'hui par mille et une spécialités et décriée par la diététique, elle reste néanmoins fal Ramdhan et la friandise des plus démunis. Connue dans tout le Maghreb, la spécialité nous vient de Bagdad, via l'Andalousie. On retrouve la recette dans un fameux ouvrage de l'époque, Livre sur la cuisine en Afrique du Nord et en Andalousie au temps des Almohades, plus connu sous le titre de l'Anonyme andalou. C'est probablement la forte communauté morisque, installée à Boufarik, qui a fait connaître la spécialité autour d'Alger. D'où la réputation de l'ancienne bourgade de la Mitidja devenue un important centre urbain. Hélas ! La spécialité, qui eut une réputation hors des frontières régionales n'est plus ce qu'elle était. À l'origine, levée naturellement, parfumée à l'eau de fleur d'oranger et imbibée de miel dilué, elle n'est aujourd'hui qu'ersatz (usage de levure chimique et aromes de synthèse. Il ne lui reste que la caractéristique de la forme en dents de peigne (mechta) et la non-coloration. On peut en trouver d'excellentes à travers le pays, où chaque région a son moul ezalabiya de renom. En général, ces derniers sont des pâtissiers tunisiens établis en Algérie. La zlabiya est arrivée dans leur pays par les mêmes chemins que chez nous.