La pénurie des biens de large consommation est une question récurrente qui fait souvent et régulièrement l'objet d'écrits dans la presse nationale et d'analyse par de nombreux économistes tendant à expliquer ce phénomène, à en cerner les causes et les effets. Si, par le passé, ce problème a été vécu péniblement par les citoyens du fait du monopole, de la rigidité de l'offre liée à l'insuffisance de la production nationale, et des dysfonctionnements des circuits de distribution, aujourd'hui, la pénurie des biens de large consommation semble relever d'un jeu politique complexe combiné aux intérêts économiques et commerciaux énormes. C'est pourquoi on parle de “pénurie organisée” ou suscitée. En théorie, cette question est censée avoir été réglée avec l'avènement de l'économie de marché et l'ouverture de nos frontières aux importations de ce type de denrées. Pour autant, cet effet pervers est toujours là. La pénurie apparaît lors d'événements socioculturels majeurs tels que le ramadhan ou à l'occasion d'autres fêtes à caractère religieux ou coutumier. Elle est de plus en plus planifiée et organisée par de puissants réseaux de spéculation à la recherche de gain facile et rapide au détriment des modestes bourses et sans se soucier de la cohésion et de la solidarité sociale. Elle est aussi aggravée par des fuites organisées de marchandises et produits soutenus par l'Etat à travers nos frontières. Elle est également accentuée par la désorganisation des circuits de commercialisation due à l'absence ou à l'insuffisance des équipements et infrastructures des stockages et de distribution au niveau régional. Enfin, l'insuffisance des moyens de contrôle de la puissance publique, censée réguler le marché, ajoute à la confusion. L'exemple de la pomme de terre est édifiant à cet égard. Phénomène devenu quasi structurel, ciblant alternativement un certain nombre de produits ou de catégories de produits, y compris les cigarettes, puisqu'elles entrent dans la gamme de large consommation, la pénurie a souvent aussi été organisée sciemment par différents lobbys comme moyen de pression dans les luttes politiques de “clans” pour déstabiliser telle ou telle tendance au pouvoir ou pour empêcher la prise de décisions économiques qui remettraient en cause leurs intérêts. Au cœur de toutes les préoccupations, parce que nécessaires aux besoins physiologiques minimum de la société, les produits alimentaires de base (semoule, lait, huile…) continuent à êtres soutenus par les pouvoirs publics pour permettre leur accès au plus grand nombre. Par ces conséquences directes sur les prix des produits de première nécessité, donc du niveau de vie des franges les plus vulnérables de la société, et des tensions inflationnistes qu'elle peut générer, la pénurie doit être cernée et approchée dans le cadre global de la politique économique et sociale de l'Etat en vue de son éradication comme phénomène de perversion économique et instrument de pression politique. Des inquiétudes commencent à voir le jour après l'adoption de la loi de finances complémentaire au titre de l'année 2009 qui régule et encadre le flux des échanges extérieurs. Ces inquiétudes sont amplifiées par certains milieux du “négoce” et relayées par certains journaux. La rentrée sociale et son cortège de revendications liées au pouvoir d'achat, à la revalorisation du SNMG et des décisions attendues de la tripartite rendent la problématique plus complexe et exigent une plus grande vigilance de la part de l'Exécutif. Il s'agit de réunir les conditions qui rendent disponibles les produits de large consommation, d'en maîtriser le mode et les mécanismes de leur distribution au niveau de l'ensemble du territoire national et d'en contrôler les éventuels dérapages. Dans ce contexte, l'apport du secteur privé national dans les domaines des produits oléagineux, céréaliers, laitiers et médicamenteux… en complémentarité avec le secteur public, devra être renforcé et encouragé.