La “potion magique” qui fait grossir à vue d'œil ne figure pas dans la nomenclature officielle de la pharmacie algérienne. “Essari'i” ou le rapide n'est pas une nouvelle ligne de train à grande vitesse assurant la liaison entre Oran et les autres grandes villes du pays. Encore moins le nom d'une compagnie de transport routier reliant les cités urbaines aux régions steppiques de l'arrière pays. Cette désignation ambiguë est le nom d'une “médication” directement importée de la lointaine Inde. Elle ne figure pas dans la nomenclature officielle de la pharmacie algérienne. Nombreux sont celles et ceux qui ont fait l'amère expérience d'user de cette “potion magique” qui fait grossir à vue d'œil. Mais de quelle manière ! A. Z. est une jeune fille qui regrette à présent d'avoir fait confiance à un vendeur à la sauvette. “Je n'ai pas grossi mais j'ai été percluse de boutons sur mon visage et sur tout le corps”, témoigne notre interlocutrice. Suivie médicalement depuis deux mois par un médecin, A. Z. se remet difficilement de sa maladie. Importé frauduleusement d'Inde, le “médicament” en question est conditionné dans une vulgaire petite boîte en plastique en une centaine de petits cachets “miraculeux” , sans la moindre indication ni contre-indication quant à son utilisation. Point de composition chimique, si ce n'est une vague recommandation en anglais vantant sommairement les mérites du produit. Inconnu des laboratoires pharmaceutiques algériens, la pilule est librement vendue par de nombreux bonimenteurs et autres herboristes au niveau de M'dina J'dida. Agissant négativement sur l'organisme en s'attaquant au rein, “Essari'i” peut conduire à une mort rapide. Plusieurs personnes tentées par la modicité du prix de cet expédient louche ont été hospitalisées ou reçues en soins intensifs pour des cas d'empoisonnement toxique. “L'utilisation de ce produit peut engendrer des complications qui s'avéreront très graves et peuvent même mettre en danger la personne qui s'amuse à prendre ce produit sans consultation médicale préalable”, affirme un médecin du service antipoison du CHU d'Oran. Des réactions cutanées à type de papules séreuses (pus) sont alors prêtes à s'infecter. Une situation qui peut s'avérer lourde de conséquences. Des pharmaciens ont affirmé avoir attiré l'attention des autorités locales ainsi que les services compétents sur les effets désastreux de ce poison magique. “Au début, je prenais une pilule avant de passer à deux sur les conseils du revendeur. J'ai perdu l'appétit avant de tomber en syncope”, affirme un jeune homme qui voulait grossir très vite. Comme lui, plusieurs personnes ont fait l'amère expérience au péril de leur vie. “Le plus dramatique dans toute cette histoire est que les revendeurs sont dans leur majorité analphabètes. Alors, comment peuvent-ils prodiguer des conseils sur les vertus de ce poison sous forme de médicament ?” souligne notre interlocuteur. Acheter ce pseudo médicament dans la rue s'avère dangereux, car c'est mettre tout bonnement sa vie en danger de mort. Cette situation est notamment générée par le laxisme des autorités compétentes en la matière. “L'absence de campagne de sensibilisation encourage les charlatans à s'adonner tranquillement au commerce de ce produit nuisible”, observe un pharmacien à M'dina J'dida. Les conséquences de la consommation de cette pilule sur la santé sont innombrables : destruction du foie, des reins et du cœur, résistance aux antibiotiques et aux antipaludiques, intoxications multiples. Les indications erronées, les sous-dosages et les surdosages ajoutent à la dangerosité de la fameuse pilule indienne cédée par des vendeurs analphabètes. En attendant, des centaines de petites boîtes dorées estampillées made in India sont vendues à 500 DA l'unité au vu et au su de tout le monde.