L'Algérie a opté pour le financement public des grands projets, depuis qu'est survenue une manne financière liée à de bons revenus pétroliers. Routes, autoroutes, voies ferrées, ports, aéroports, raffineries, centrales électriques et stations de dessalement d'eau de mer sont tous des grands projets qui exigent de gros financements et qui sont financés sur fonds de l'Etat. Jusqu'ici, l'Algérie a réalisé quelques montages financiers de projets, mais la plupart du temps, elle a recouru aux fonds publics pour financer ses réalisations industrielles et infrastructurelles. Selon le Dr Bouyahiaoui, “le leadership algérien a pris la décision de rembourser la dette publique par anticipation, en écartant toute possibilité ultérieure de recourir à l'endettement externe. C'était du temps où M. Medelci était ministre des Finances, contrairement à M. Benachenhou, qui l'avait précédé en tant que premier argentier du pays, qui, lui, refusait de recourir exclusivement aux fonds publics pour financer les grands projets, préférant y associer d'autres sources de financements. Or, non seulement les banques nationales publiques ne sont pas autorisées à chercher des crédits extérieurs au niveau des marchés de capitaux étrangers, mais même les entreprises publiques sont limitées dans ce type de montage financier, à l'exception de quelques rares projets de Sonatrach qui a pu s'allier à d'autres entreprises dans des formules d'alliances stratégiques et de partenariat, qui se sont parfois avérées malheureuses, comme celles conclues avec les entreprises espagnoles en vue de réaliser le Medgaz”. Un montage financier est en général réalisé en faisant appel à une banque d'affaires ou à des sociétés spécialisées dans la filière du montage financier. “Il est fait appel à une grande banque classée dans les 25 à 50 premières banques dans le monde, lorsqu'il s'agit d'un grand projet dont l'enveloppe se situe entre 1 et 5 milliards de dollars. Cette grosse banque jouera le rôle de banque chef de file pour prendre attache avec d'autres banques en vue de réaliser le montage financier du projet, en négociant les taux d'intérêt exigés par chaque banque partie prenante, les primes, etc. De manière générale, il existe deux taux d'intérêt : le Libor (London Interbank Offered Rate), pour la place de Londres, et l'Euribor (European Interbank Offered Rate) pour la lace européenne. Ces taux d'intérêt sont connus, ce qui l'est moins c'est la prime de risque qui fluctue selon la classification par risque pays.” En plus de cela, il faudra tenir compte des délais de remboursement, des primes à payer en cas de dépassement, etc. Mais s'agissant de montages financiers, on tente de mettre en place un consortium de banques ou un pool bancaire, afin que les risques soient partagés. “Nulle banque au monde ne peut prendre le risque de financer à elle seule des projets d'envergure”, explique le Dr Bouyahiaoui qui cite des exemples d'appels d'offres de Sonatrach où des entreprises étrangères ont fait l'offre technique et financière, et réalisé le montage financier, comme dans le cas des Japonais qui ont réalisé des montages financiers avec des banques japonaises il y a quelques années. Selon le Dr Bouyahiaoui, “l'idéal pour l'Algérie est que les grands travaux (métros, barrages, autoroutes, aéroports, ports, etc.), soient réalisés en BOT, afin d'éviter l'opacité ou la tricherie dans les attributions, les délits d'initié et les détournements. Parce que c'est à l'entreprise soumissionnaire qui obtient le marché de réaliser le montage financier du projet, de le mener à bien, de l'exploiter afin d'en tirer bénéfice, donc de le gérer au mieux durant une période de 20 à 30 ans, à ses risques et périls”. Dans la formule BOT (Build Operate and Transfer), la gestion des projets incombe à celui qui enlève le marché, avant, pendant l'exécution du projet et durant son exploitation. L'Algérie pourrait très bien ajouter une clause de formation, gestion et suivi, dans ce genre de projet lorsqu'il est confié à une entreprise qui le réalisera en formule BOT. À la fin de la période de validité d'exploitation du projet en BOT, généralement une infrastructure lourde, on pourra toujours signer avec l'entreprise qui l'a réalisé un contrat de management. L'entreprise, qui a bénéficié du marché BOT, pourrait payer une somme d'argent pour continuer à gérer les installations, ou encore gérer l'installation et partager les profits nets d'impôts avec l'Algérie (qui bénéficierait alors de revenus fiscaux, en sus du partage des recettes générées par les installations). “Dans la formule BOT, le leadership algérien n'aura plus aucun souci des retards (qui incomberont, ainsi que les surcoûts qui y sont directement liés) dans la concrétisation des projets, de leur gouvernance ou leur transparence. Les pertes et profits n'incomberont qu'à l'entreprise qui aura enlevé le marché. Malgré tout il sera toujours possible de réaliser des montages financiers grâce à des alliances et partenariats internationaux publics et privés. On peut réaliser des montages financiers et des augmentations de capital grâce à l'émission d'emprunts obligataires au niveau national, de même qu'il sera toujours possible de faire appel à l'épargne étrangère par le biais des eurocrédits ou des euro-obligations, vendues en dehors d'Algérie.”