Liberté : La session parlementaire qui s'ouvre aujourd'hui est marquée par un contexte politique tendu, la suspension des journaux, et par des supputations évoquant une dissolution de l'Assemblée nationale. En tant que président de l'APN, que pensez-vous de cette éventualité ? M. Karim Younès : J'aurais l'occasion de m'exprimer aujourd'hui, lors de la cérémonie officielle d'ouverture de la session du Parlement sur toutes les questions de la vie politique nationale et sur les différents textes législatifs proposés par le gouvernement à l'APN. Quant à l'éventualité de la dissolution de l'Assemblée nationale, je n'ai aucune information à ce sujet et cette décision relève des prérogatives constitutionnelles du président de la république. Donc, vous comprendrez que je ne puisse la commenter. D'autant plus qu'il ne s'agit que d'une éventualité. Dans tous les cas de figure, si dissolution il y a, la terre continuera de tourner, le soleil de se lever et la lune d'inspirer les romantiques. Comment voyez-vous cette session, alors qu'elle intervient à quelques mois de la présidentielle de 2004 ? L'Assemblée nationale fonctionnera comme elle l'a toujours fait jusque-là. La session débattra d'un certain nombre de textes de loi dans la sérénité. Les députés font montre de beaucoup de responsabilité. Et il est tout à fait normal que les députés aussi affrontent l'échéance politique à venir en essayant de montrer à travers leurs activités au Parlement, les positions et les idées de leur parti. Ceci ne nous inquiète pas. Le multipartisme doit être une réalité. L'assemblée est multipartite, il faut l'accepter. Il faut également permettre à toutes les formations politiques de s'exprimer en toute liberté. Il ne doit y avoir de contraintes que celles que peut imposer la conscience de chaque individu. En ce qui me concerne, sachez que la liberté de ton et le respect de chaque formation politique j'en fais mon credo, le débat contradictoire, je l'encouragerai. Bien au contraire, cette session augure de bonnes choses pour le multipartisme. Car le multipartisme, ce n'est pas une pensée unique. On a souvent assimilé votre institution à une chambre d'enregistrement. Est-ce que cela va changer lors de cette session qui s'ouvre aujourd'hui ? Vous conviendrez avec moi qu'à l'APN, on enregistre beaucoup de débats qui sont généralement chauds et contradictoires. C'est une chambre qui enregistre aussi des positions politiques qui se rejoignent ou qui s'éloignent. Contrairement à ce que pensent certains, l'APN est une chambre de débat et d'examen des textes législatifs. On a tendance à dire de l'APN qu'elle est une chambre d'enregistrement, car elle n'exerce pas de contrôle sur le pouvoir exécutif… Pourquoi dites-vous qu'elle n'exerce pas son rôle de contrôle ? Les questions orales, les questions écrites, les interpellations, les commissions parlementaires sont les moyens du député de contrôler l'exécutif. D'ailleurs, à chaque débat sur un projet de loi, les députés interviennent de façon à mettre l'Exécutif en situation de répondre aux préoccupations exprimées. En tant que président de la deuxième institution de l'Etat algérien, comment avez-vous réagi à la suspension qui a ciblé certains titres de la presse ? Lors de l'ouverture de la session, j'aurai à m'exprimer sur cette question. Mais, je peux vous dire d'ores et déjà que dans un pays qui s'est ouvert depuis 1989 au multipartisme et à la liberté d'expression, on aimerait vivre la liberté de la presse et le multipartisme dans la sérénité. N. M.