Rien ne va plus entre le président de l'Autorité palestinienne et son Premier ministre. Les deux hommes ne travaillent plus ensemble. Le risque de divorce est très élevé. Devant cette situation, le président du Parlement palestinien réunira, demain, la Chambre pour tenter de réconcilier les deux premières personnalités du pays. “Désormais, il ne s'agit plus d'aplanir les différends. Le conflit ne peut être résolu que s'ils acceptent de travailler ensemble.” Ces propos de Ahmed Qoreï, le président du Parlement palestinien, illustre la gravité du conflit opposant le leader de l'OLP et de son numéro deux. Le problème de fond entre les deux hommes se situe au niveau du contrôle des services de sécurité palestiniens. Ils se livrent une lutte sans merci, dont l'issue aura des répercussions sur l'avenir politique de la Palestine. Mahmoud Abbas veut, en sa qualité de ministre de l'Intérieur, contrôler les 35 ou 40 000 hommes composant l'ensemble des services de sécurité de l'Autorité palestinienne, dont la majeure partie est sous la coupe de Yasser Arafat. Cette question est la goutte qui a fait déborder le vase, car la crise entre Abbas et Arafat remonte à la période de création du poste de Premier ministre. Le président de l'Autorité palestinienne, totalement opposé à la nomination d'un Chef de gouvernement, n'avait cédé que devant la terrible pression de la communauté internationale. L'arrivée de Mahmoud Abbas à la tête de l'Exécutif palestinien, n'a fait qu'aggraver le différend, car Yasser Arafat se voyait priver d'un certain nombre de ses prérogatives. Il faut rappeler que le leader de l'OLP a accepté, la mort dans l'âme, la nomination du colonel Mohammed Dahlane au poste de ministre délégué à la Sécurité. Cela montre l'importance de la question de la sécurité, dans les relations entre Abou Mazen et Yasser Arafat. Conscients de l'importance de cette question, les parlementaires palestiniens ont décidé d'en débattre demain dans le cadre d'une réunion du Conseil législatif palestinien (CLP), dans l'espoir de parvenir à une solution à même de satisfaire les deux hommes forts de l'Autorité palestinienne. Ahmed Qoreï, troisième personnalité du système, a fait à ce titre plusieurs tentatives de médiation sans succès. C'est le président de l'Autorité palestinienne, qui tout en précisant qu'il n'était nullement disposé à céder sur ses prérogatives, accepte néanmoins de soumettre ce point au Conseil national palestinien afin qu'il tranche. Selon un proche de Yasser Arafat, le député Hatem Abdelkader, le vieux leader joue sa survie dans ce différend avec Mahmoud Abbas. À en croire ses affirmations, les Américains et les Israéliens sont derrière le chef du gouvernement palestinien afin de mettre hors circuit définitivement Arafat. Pour le politologue Hani Al-Masri, "le conflit actuel est un conflit de pouvoir" entre les deux hommes. Il estime également que "la crise actuelle va affaiblir” tout le monde et va renforcer de plus en plus l'idée d'une tutelle internationale, à travers une intervention directe des Etats-Unis. D'ailleurs, les Américains ne sont pas restés les bras croisés. L'envoyé spécial du président Bush dans la région, John Wolf, a rencontré le président du Parlement palestinien pour lui demander de soutenir Mahmoud Abbas. L'avenir de Yasser Arafat se jouera sur le point crucial de la sécurité. Le soutien international, dont bénéficie Abou Mazen, pourrait lui être fatal. K. A. Mohammed Dahlan, pessimiste sur la date du futur Etat palestinien Le bras droit du Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas, Mohammed Dahlan, ministre délégué à la Sécurité, s'est montré pessismiste sur les chances du futur Etat palestinien de voir le jour en 2005, dans une interview parue, hier, en Italie. "En 2005, non, c'est trop tôt, mais nous l'aurons", a-t-il déclaré au quotidien Corriere della Sera, à trois jours d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne dans le nord de l'Italie, sur les bords du lac de Garde. Le Proche-Orient, et en particulier la mise au ban du Hamas, sont à l'ordre du jour de cette rencontre informelle vendredi et samedi. "Israël ne peut arrêter le cours de l'Histoire, qui veut le retour aux frontières de 1967, d'avant la guerre. J'étais enfant, j'avais six ans, mais je me rappelle de tout", a ajouté le ministre palestinien. Il a demandé au gouvernement italien de Silvio Berlusconi, qui assure la présidence tournante de l'UE, "d'utiliser son amitié avec Ariel Sharon pour le pousser à réaliser vraiment les engagements pris (par Israël) dans la feuille de route". Fin juillet, le président américain George W. Bush avait estimé que la création d'un Etat palestinien en 2005 était un objectif réaliste. Cette date figure dans la "feuille de route" sur le règlement du conflit israélo-palestinien.