Le célèbre cinéaste algérien, Abderrahmane Bouguermouh, le réalisateur du premier film d'expression amazighe, la Colline oubliée, a eu finalement droit, de son vivant, à un hommage digne des grands hommes. En effet, cet enfant prodige de la Soummam, qui a consacré toute sa vie au septième art, vient d'être honoré par les siens, à savoir les jeunes animateurs de l'association Horizons d'Ouzellaguen, sa commune natale, à laquelle il est resté toujours attaché. Lorsque certains de ses amis avaient choisi le chemin de l'exil, durant les années 1990, où le terrorisme islamiste massacrait les intellectuels, Abderrahmane Bouguermouh, lui par contre, a préféré rester dans son pays, bravant la menace intégriste qui pesait à l'époque tel l'épée de Damoclès sur l'élite nationale, notamment les partisans de la modernité et de l'universalité. Ainsi, il décida de continuer son combat culturel, puisqu'il releva le défi de mener à bien le projet qui lui tenait à cœur depuis la fin des années 1960, celui d'achever l'adaptation du roman de Mouloud Mammeri, la Colline oubliée. Téméraire, il est résolu à se battre jusqu'au bout, quitte à payer les frais de sa ténacité. Il résistera avec beaucoup de bravoure aux exactions de tous bords. Mais au fil des années, le temps a fini par lui donner raison, puisque son rêve se réalisa. Le film dont il a tant rêvé voit finalement le jour, en mai 1996. Considéré comme le premier long métrage d'expression berbère, la Colline oubliée a connu un succès retentissant aussi bien en Kabylie qu'ailleurs. Durant la décennie noire, Bouguermouh n'avait que sa Kabylie où se réfugier. Tout le monde se souvient de lui lorsqu'il venait souvent se ressourcer avec ses amis, dans son ancien domicile familial, à Ighzer Amokrane, dans la commune d'Ouzellaguen. Altruiste sincère, Abderrahmane Bouguermouh a le cœur sur la main, lui, qui ne refusait personne qui le sollicitait pour une aide quelconque. Comme il a toujours ouvert les portes de sa maison à toute personne venant lui rendre visite. C'est ainsi que ses amis et proches ont témoigné, hier, à la faveur de la conférence organisée à la Maison de jeunes d'Ouzellaguen, dans le sillage des activités arrêtées par l'association Horizons. Plusieurs invités, dont des artistes de différents horizons (théâtre, cinéma, musique, poésie…), sont intervenus pour apporter leur témoignage aussi bien sur la vie de Bouguermouh que sur son parcours artistique. Au-delà de sa carrière de cinéaste et de ses films, les conférenciers ont également abordé le côté humain de Dda Abderrahmane, en évoquant ses qualités humaines jugées exceptionnelles. Tout comme ils sont revenus sur son profil intellectuel, en sa qualité d'homme littéraire, puisqu'il a déjà publié un livre appréciable, intitulé Anza.