La rencontre centrée sur le thème “Les convulsions de la scène énergétique et perspectives à long terme. épuisement des ressources, nouveaux pôles de croissance mondiale, lutte pour le leadership et l'accès aux ressources” organisé le 26 février dernier avec le soutien du ministère de l'énergie par le cabinet Emergy et le quotidien Liberté, à l'occasion de la célébration du 24 février, date de la nationalisation des hydrocarbures, a regroupé une centaine de participants dont des P-DG de compagnies nationales particulièrement de Sonelgaz, de Naftal et des représentants de compagnies internationales dont notamment Total, Gazprom et Talisman Après la communication du Dr Mourad Preure, expert pétrolier international, président du cabinet Emergy, c'est M. Ali Hached, conseiller principal du ministre de l'énergie et des Mines qui a évoqué les tendances lourdes de la transition énergétique des prochaines années, avant que M. Claude Mandil, ancien président de l'Institut français du pétrole et ex-DG de l'AIE ne le relaye pour parler tendances lourdes, pour le long terme, sur le même sujet. Selon Claude Mandil, les problèmes du changement climatique vont peser de plus en plus lourdement sur les politiques énergétiques mondiales. “Le centre du monde va se déplacer de plus en plus vers l'Asie et plus particulièrement la Chine, alors que le pétrole Opec va être de plus en plus sollicité”. Par contre, selon ce même conférencier, “l'âge d'or du gaz est à venir, à condition que les prix ne soient pas excessifs”. S'il faut oublier l'idée d'un pétrole bon marché, “le peak-oil ne peut pas être un problème géologique mais un problème d'investissements et d'impact sur l‘environnement”. La demande en produits pétroliers devrait fortement augmenter, tirée par la croissance du parc automobile dans les pays émergents. Vers un âge d'or du gaz Il n'en demeure pas moins que le pétrole brut devrait connaître à l'avenir un plateau autour de 70 Mbj. D'autres ressources énergétiques seront plus exploitées comme le condensat, le GPL, les pétroles non conventionnels, les biocarburants. “Le rôle de l'Opep va devenir prépondérant par rapport à ce qui est attendu des pays non-Opep. Le monde va s'électrifier de plus en plus, grâce au nucléaire, aux énergies renouvelables et au charbon aussi, si on améliore les techniques de capture et de séquestration du CO2. Car le charbon est un moyen simple de fabriquer de l'électricité qui restera dominant jusqu'en 2035 en Europe et en Chine”. Si la part des énergies renouvelables augmente un peu partout, dans les pays de l'UE ainsi qu'en Chine, le gaz entre dans la plupart des scénarios de l'AIE et devrait voir sa part croître de 50% vers 2035, dans la consommation globale d'énergie, selon Claude Mandil. Les USA sont en train d'évoluer d'un statut de pays importateur net de gaz, à un statut d'exportateur. Le gaz deviendra durablement, dans un avenir proche, un élément important du mix énergétique. Avec l'arrivée de nouveaux producteurs sur le marché du gaz, le développement des exportations qataries de GNL, “l'AIE pense que les prix du gaz finiront par devenir plus modérés”. Une affirmation soutenue par l'ancien président de l'AIE, qui pourtant, dès sa prise de parole, avait annoncé ne parler qu'en son propre nom, et n'engager que sa personne. Or, il s'avère que cette position coïncide exactement avec celle de l'ensemble des pays consomateurs ! Il pense que les contrats de gaz à long terme, à des prix modérés s'entend, continueront à avoir de beaux jours devant eux. “Mais les prix du gaz ne devraient pas être absolument indexés à ceux du pétrole”. Il faut savoir que le prix du gaz en valeur comparée en tep, 1 tep (tonne équivalent pétrole) = 1 000 m3 de gaz, équivaut au tiers de celui du pétrole environ. Le pétrole coûte plus cher parce que ses sous produits sont plus nombreux. L'Algérie doit utiliser sa rente pour développer l'industrie et l'agriculture Selon Claude Mandil, les prix du gaz devraient être indexés sur ceux du marché spot ou de l'électricité, même s'il admet que les prix du gaz devraient être suffisamment élevés mais raisonnables, pour permettre les investissements d'exploration et d'exploitation qui coûtent cher. Mais l'Algérie devrait augmenter les prix du carburant qui sont trop bas, selon Claude Mandil, et continuer à collaborer avec les institutions internationales. Le Professeur Amor Khelif rappelle que “l'Algérie n'est ni l'Arabie Saoudite pour le pétrole, ni la Russie pour le gaz, et qu'il lui faudra satisfaire un marché intérieur qui progresse rapidement et préparer le long terme, en sanctuarisant les réserves de pétrole et de gaz en les inscrivant, au besoin, dans la constitution afin d'en éviter la dilapidation, en résistant aux pressions démultipliées exercées par les pays consommateurs sur les pays producteurs”. La rente pétrolière devrait, aussi, être mieux utilisée selon les intervenants. Claude Mandil, vers la fin de son intervention avait abordé brièvement le syndrome hollandais, le “dutch disease”, pour recommander d'éviter sa propagation. Qu'est-ce que le syndrome hollandais Le terme “syndrome hollandais” provient d'une crise qui s'est déclenchée aux Pays-Bas dans les années 1960 à la suite de la découverte de vastes gisements de gaz naturel en mer du Nord. Cette richesse subite a renforcé la valeur du florin hollandais, rendant les exportations de tous les produits non pétroliers moins compétitifs sur le marché mondial. Nous sommes en plein scénario algérien. En attendant d'en changer.