L'année 2010 a été marquée par de bons résultats en termes d'attraction d'investissement direct étranger (IDE) et de partenariats internationaux vers les pays MED (les 9 partenaires du Sud, plus la Libye et la Turquie). Prise entre deux crises (la tourmente économique mondiale des années 2008-2009 et les révolutions arabes du début 2011), 2010 a également été une année de transition pour la rive sud de la Méditerranée. D'après le bilan annuel de l'Observatoire des investissements et partenariats en Méditerranée Anima-Mipo, le nombre d'annonces de projets d'IDE est largement reparti à la hausse dans les pays MED avec 826 projets détectés en 2010, contre 542 en 2009, soit +52%. La hausse est moins nette en termes de montants : 33,2 milliards d'euros contre 28,4 milliards d'euros en 2009, soit +17%. Les partenariats internationaux d'entreprises poursuivent, pour leur part, leur augmentation : 493 projets en 2010 contre 288 en 2009, soit +71%. Il faut y voir en partie l'effet du programme Invest in Med, qui se consacre à ces partenariats et les détecte mieux. En termes de pays d'origine, les entreprises européennes viennent largement en tête en 2010 avec la moitié des investissements en montants. Abonnés à la deuxième place du palmarès, les pays du Golfe sont maintenant rejoints par les USA/Canada et les pays émergents. La prédominance européenne est encore plus forte pour les partenariats (264 projets, soit 54% du total en 2010), l'Amérique du Nord venant ensuite (20% des projets), puis le Golfe (12%). Mais, par rapport à 2009, les partenaires du Golfe triplent et ceux entre pays MED doublent, ce qui est très encourageant pour l'avenir de l'intégration Sud-Sud. La Turquie, l'Egypte et Israël s'affirment comme les trois destinations majeures des IDE. Les performances du Maghreb sont globalement décevantes. Seule la Tunisie a enregistré une forte hausse des IDE avant la crise politique de la fin de l'année 2010. Les annonces d'IDE sont, en revanche, au plus bas depuis quatre ans en Libye, et elles se maintiennent à un niveau comparable à celui de 2009 au Maroc. “Le Maroc, brillant pour les partenariats et apprécié des PME, n'a pas réalisé un très bon score, et encore moins l'Algérie, marquée par un certain antilibéralisme (restrictions sur les importations, sur le contrôle des IDE etc.)” , lit-on dans le document, relevant qu'en 2010, l'Algérie a connu un net recul des annonces d'IDE, en nombre de projets comme en montants, de même qu'une baisse sensible de flux réels d'IDE (-13% par rapport à 2009 d'après la Banque mondiale). Selon Invest in Med, les investisseurs sont “vraisemblablement découragés par les nouveaux durcissements de la loi de finances complémentaire 2010 qui donne, par exemple, la préférence aux entreprises algériennes dont les offres financières dépassent celles de leurs concurrents étrangers jusqu'à un surcoût de 25%”. L' Algérie, entre 2008 et 2010, a reçu 650 millions d'euros d'IDE de la France, 147 millions d'euros d'Italie, 134 millions d'euros des Etats-Unis, 83 millions d'euros de la Russie, 67 millions d'euros d'Oman, 64 millions d'euros d'Australie, 54 millions d'euros d'Espagne et 38 millions d'euros d'Egypte et du Liban. Au Machrek, l'Egypte est loin de ses records passés, la Syrie confirme son attractivité nouvelle, le Liban reçoit surtout des investissements de portefeuille et les autres pays (Jordanie et surtout Palestine) stagnent. Anima indique que l'Egypte et la Turquie ont été ajoutées à la liste des pays émergents en 2010 appelés par l'Economist Intelligence Unit les Civest (Colombie, Indonésie, Vietnam, Egypte, Turquie et Afrique du Sud). Ainsi, entre 2003 et 2010, l'Egypte a été le 11e plus gros investisseur étranger dans la région. Elle a beaucoup investi en Algérie (30 projets pour un montant net de 4,3 milliards d'euros). “Malgré ces résultats indiscutables, le modèle de développement des pays méditerranéens partenaires de l'Europe apparaît contesté, à travers les changements en cours, en particulier en Afrique du Nord (Tunisie, Egypte, Libye) : c'est que les dividendes de l'ouverture économique ne bénéficient guère à la masse de la population et s'accompagnent d'effets indésirables (forte concentration des IDE sur certains espaces, valeur ajoutée locale trop réduite, impact parfois négatif sur l'environnement ou la culture, éviction de certaines entreprises domestiques au profit d'opérateurs étrangers, etc.)”, relève Anima, estimant qu'un modèle de développement, qui crée encore davantage d'emplois, qui renforce le tissu industriel local, qui donne plus d'importance aux initiatives du Sud, qui respecte mieux les critères de responsabilité sociale, qui valorise tout le territoire et toute la population, reste encore largement à construire.