Résumé : Le grand jour arrive. Une délégation se rendit à Fort-National et on déterra les restes de Mahmoud et de ses compagnons, qu'on a pu identifier grâce à des indices précis. Le moment est mémorable et l'assistance est émue. 103eme partie À ce moment, Nacéra réprima un sanglot. Un pan de salopette encore accroché à une boucle toute rouillée recouvrait l'omoplate droite. Il n'y avait plus de doute, c'était les restes du petit Hamid. On retira les ossements qu'on entassa dans un sac en plastique. La famille du petit Hamid s'approcha l'air triste et sérieux à la fois. Après tant d'années, on retrouve enfin cet enfant prodigue, qui s'était donné corps et âme pour l'indépendance de son pays. Grâce à d'autres indices, tels qu'une balle logée dans le crâne de Si Mustapha, on réussira facilement à identifier les deux autres squelettes. L'assistance garde un silence sacré pendant quelques instants. Le moment était très émouvant. Comme pour le premier corps, on met les deux autres corps, ou ce qu'il en reste, dans deux sacs en plastique sur lesquels on colle des étiquettes comportant leurs noms. - C'est ma mère qui sera contente, lance Rachid d'une voix étranglée. - Oui, murmure Nacer. Après tant d'années, elle pourra enfin se recueillir sur la tombe de notre père autant de fois qu'elle en aura envie. Nacéra essuie ses yeux et dit d'une voix étouffée : - J'ai tant prié Dieu de me permettre de vivre ce grand jour. Voilà enfin mon vœu exaucé. Je pourrais désormais mourir en paix. - Rachid lui entoure les épaules. - Inch'Allah, tu vivras encore de longues années, Nacéra. Jamais nous n'oublierons ce que tu as fait pour nous. - Je n'ai fait que mon devoir. Je pense que la découverte et le transfert de ces restes mettront un peu de baume aux cœurs meurtris de leurs familles. - Sûrement, renchérit Nacer, c'est tellement incroyable, nous n'avons jamais cru vivre un aussi grand jour. On entasse les sacs comportant les ossements dans une ambulance et un cortège se constitue derrière le véhicule. On revint alors à Alger où les restes seront acheminés vers un hôpital afin de les étudier une dernière fois, et de les garder au frais en attendant de programmer leur enterrement. On fera coïncider l'évènement avec la célébration de la Journée du moudjahid. Le 20 août, donc, Fettouma et toute sa famille se retrouvèrent au carré des Martyrs où plusieurs cercueils étaient disposés en bataille. Nacéra se tint au côté de Fettouma. Elle portait un foulard blanc et s'était cachée les yeux derrière des lunettes noires. Elle avait passé la nuit à pleurer. Ces restes qu'on avait enfin retrouvés appartenaient à des êtres qu'elle avait côtoyés et soignés. Elle repense à Mahmoud. Comme elle l'avait aimé ! Mais lui… Elle pousse discrètement un soupir. Mahmoud ne lui parlait que de Fettouma. Il aimait sa femme, et aucune autre ne pouvait la remplacer dans son cœur. Pourtant, elle avait espéré. Elle avait attendu. Mais Mahmoud était parti. Il l'avait quittée en lui faisant promettre d'aller retrouver les siens, pour leur apprendre qu'il était mort en héros auprès de tous ceux qui n'avaient pour but que de libérer leur pays de l'oppression coloniale. Fettouma, qui avait elle aussi les yeux rougis à force d'avoir pleuré, s'était doutée dès le début de cet amour que portait discrètement Nacéra à Mahmoud. Et ici, devant son cercueil, elle ressentit un peu de jalousie. Mal placée bien sûr, puisque son mari n'était plus de ce monde. Mais elle se demanda quand même si réellement il n'y avait rien eu entre lui et Nacéra. Avait-il été attiré un jour par elle ? Est-elle la seule à qui il se confiait ? Mais elle balaya vite ses doutes et se sentit même ridicule. Quoi qu'il en soit, Mahmoud l'avait toujours aimée. C'est elle son épouse et la mère de ses enfants, et il l'avait choisie parmi des dizaines d'autres femmes alors qu'elle était encore une enfant. Un représentant des moudjahidine relate certains faits historiques que les nouvelles générations ne devraient jamais oublier. Ensuite, un imam récita l'oraison funèbre et loua le courage et la bravoure de ces hommes, que l'Algérie avait enfantés, et que ceux-ci avaient défendue et libérée avec leur sang. On procéda ensuite à l'enterrement des restes, et chaque famille se regroupa autour de son “chahid”. (À suivre) Y. H.