La région a bénéficié d'un ambitieux projet d'appui au développement socioéconomique, initié par le ministère des Affaires étrangères et l'Union européenne, dont les participations financières, estimées à 10 000 000 d'euros débloqués par l'Etat algérien et 50 000 000 d'euros débloqués par la commission européenne, restent insuffisantes. La petite commune de Khirène, qui compte à peine 300 familles, située à 80 kilomètres au sud du chef-lieu de la wilaya de Khenchela, a rompu avec le calme. Il y a un mois, les Khiranis ont bloqué et occupé le siège de la commune pour protester contre la malvie que connaît leur village, mais la goutte qui semble avoir fait déborder le vase, ce sont les attestations de construction de logements ruraux, distribuées il y a plus de quatre ans aux différents bénéficiaires et qui sont restées sans concrétisation. Pis encore, certains villageois nous parlent d'une annulation pure et simple que les responsables locaux ne veulent pas assumer. “Nous sommes des oubliés…” Les habitants du village de Khirène ont fait une grande gymnastique pour prendre attache avec notre journal, afin d'exposer leurs problèmes. Leur satisfaction était encore plus grande, nous dit un de nos hôtes, car la route fut fermée pendant deux jours à cause de fortes chutes de neige. Pour entrer dans le vif du sujet, M. Khireni Smaïl (chef de famille et agriculteur) ne mâche pas ses mots. “Nous avons demandé à un cousin de vous écrire, honnêtement, sans grand espoir de vous voir. Les rares titres de presse que nous ramenons du village de Chéchar, à plus de 36 kilomètres d'ici, ne s'intéressent pas aux modestes villageois que nous sommes. Regardez vous-même, nous n'avons d'autre source de revenus que notre terre et, là encore, elle est menacée aussi bien par la pollution, car des fosses sceptiques sont mitoyennes au cours d'eau, que par l'avancée du désert et du béton. Mais le coup de grâce nous vient de nos propres responsables. Après avoir attendu plus de trois ans, avec une attestation de bénéficiaire de construction locale, on apprend que tout est annulé. Alors, nous avons fermé et bloqué les locaux de l'APC pour protester contre cette moquerie. Et nous ferons plus, si c'est nécessaire.” Les présents confirment les dires de notre interlocuteur et étayent ses propos par d'autres exemples, aussi tristes que nombreux. Tout le village consomme une eau impropre, avec un taux de sel très élevé. “Il n'y a dans le village aucun taxi attitré”, nous dit Hamza, un jeune cadre. Avant d'ajouter : “Quand les villageois sont dans l'obligation de se déplacer vers Khenchela, ils doivent débourser pas moins de 400 DA, ceci quand ils ne sont pas dans l'urgence. Il nous arrive de prendre un taxi pour 6 000 ou 7 000 DA, quand il s'agit d'une urgence médicale. Nous entendons à la radio, mais aussi à la télévision, de hauts responsables parler d'aides, mais dans la réalité, nous ne voyons rien, dans la mesure du possible, ils peuvent cesser donc de parler, c'est plus décent.” Concernant le secteur de la santé, un seul médecin généraliste (femme) prend en charge trois localités : Chéchar, Djellal et Khirène. Ainsi, il est impossible pour elle de faire un suivi dans les normes, et le soin, qui est un droit, devient un luxe. Pis encore, en période de chaleur, les villageois prient le Tout-Puissant de ne pas tomber malade, car la petite et unique salle de soins reste fermée trois mois. Pourtant, la région a connu un ambitieux projet d'appui au développement socioéconomique initié par le ministère des Affaires étrangères et l'Union européenne, dont les participations financières estimées à 10 000 000 euros débloquées par l'Etat algérien et 50 000 000 euros débloqués par la commission européenne. Ce projet ambitionnait d'améliorer le niveau et la qualité de vie des populations de zones rurales pauvres du nord et de l'est algérien, de stabiliser les populations de ces zones, promouvoir la participation active des groupes sociaux vulnérables… réaliser plusieurs seguias, des forage, mais aussi des captages de source et alimentation en eau d'irrigation du barrage de Babar, dont les bienfaits sont reconnus, surtout durant les grandes chaleurs. Tout cela reste, cependant, insuffisant.