Le chef de la mission du FMI estime que la détérioration de l'environnement économique international pourrait entraîner une baisse prolongée du prix du pétrole, qui dégraderait fortement les équilibres budgétaires. Le Fonds monétaire international a salué, hier, les performances macroéconomiques réalisées par l'Algérie en 2011, tout en soulignant l'urgence d'une diversification de l'économie avec un secteur privé dynamique et générateur d'emplois. M. Joël Toujas-Bernaté, chef de la mission du FMI, lors d'une conférence de presse organisée hier à l'Ecole supérieure des banques, relève le risque de voir “ce qui a été le principal moteur de croissance ces dernières années, à savoir le programme d'investissement public, ne plus pouvoir jouer un rôle aussi dynamique”. Le chef de la mission du FMI estime qu'il faut trouver d'autres moteurs de croissance. “Avec la maturation du programme d'investissement public, le secteur privé devra être en mesure de prendre le relais comme moteur de la croissance de l'activité hors hydrocarbures”, a-t-il suggéré. Du coup, le FMI recommande la poursuite d'un programme de réformes structurelles ambitieux qui permette l'amélioration du climat des affaires et de la compétitivité des entreprises, “afin de renforcer les perspectives de croissance et d'emploi”. M. Joël Toujas-Bernaté s'est félicité des mesures prises lors de la dernière tripartite, visant à améliorer l'environnement de l'entreprise, “qui dénotent une réelle prise de conscience plus aiguë pour permettre à l'entreprise privée de mieux se développer”. De bonnes performances en 2011 “Dans un contexte international incertain, l'Algérie continue d'enregistrer une bonne performance économique tirée en grande partie par les investissements publics”, relève la mission du FMI, estimant que les politiques macroéconomiques prudentes suivies par le passé ont permis à l'Algérie de constituer une position financière confortable avec des niveaux d'endettement très faibles. Le chef de la mission du FMI prévoit une croissance hors hydrocarbures d'environ 5%, tirée par la dépense publique et une bonne campagne agricole. “Une nouvelle baisse de la production des hydrocarbures, observée depuis quelques années, devrait, cependant, ramener le taux de croissance global à environ 2,5%”, précise M. Joël Toujas-Bernaté. Pour rappel, la loi de finances 2011 table sur un taux de croissance de 3,9% (6% hors hydrocarbures). L'inflation reste globalement modérée et devrait se situer aux alentours de 4%. “Nous n'avons pas vu de pressions inflationnistes très fortes se manifester suite aux augmentations de salaires effectuées dans le secteur public”, note M. Joël Toujas-Bernaté, estimant qu'“une partie de ces revenus supplémentaires a été épargnée, d'où l'augmentation importante des dépôts auprès des banques, et une partie s'est portée sur l'importation de biens de consommation, y compris de véhicules”. La position extérieure s'est améliorée par rapport à 2010, avec des réserves de changes qui restent très confortables. Le solde courant s'est fortement amélioré, principalement en raison de la hausse des prix des hydrocarbures qui compense la hausse des importations. Par contre, sur le plan budgétaire, l'augmentation des dépenses de 34% va conduire au creusement du déficit budgétaire qui pourrait s'établir vers 5% du produit intérieur brut, contre 2% enregistré en 2010. Des perspectives obscurcies par l'environnement économique international “Les perspectives à moyen terme restent favorables, à condition que des réformes ambitieuses soient poursuivies”, indique le chef de mission du FMI, avertissant que “ces perspectives sont soumises à certains risques”. M. Joël Toujas-Bernaté estime que la détérioration de l'environnement économique international pourrait entraîner une baisse prolongée du prix du pétrole, qui dégraderait fortement les équilibres budgétaires. Pour 2012, le secteur hors hydrocarbures devrait enregistrer une performance comparable à celle de cette année, avec une croissance de 5%, selon le FMI. La production du secteur des hydrocarbures pourrait se stabiliser, conduisant à une croissance globale estimée à 3%. M. Joël Toujas-Bernaté indique que “compte tenu de la croissance des dépenses courantes de ces dernières années, la protection de la viabilité à long terme des finances publiques va requérir une plus grande rationalisation des dépenses courantes et la poursuite d'une mobilisation dynamique des recettes hors hydrocarbures”. “Nous avons constaté une augmentation très marquée des dépenses de fonctionnement en 2011, ce qui peut réduire, dans le futur, les marges de manœuvre et laisser moins de place aux dépenses d'investissement”, a-t-il ajouté. Du coup, pour le FMI, “il sera important de poursuivre les efforts pour améliorer la maîtrise et le ciblage des dépenses, y compris les salaires et les transferts sociaux”. Questionné sur les placements des réserves de changes, M. Joël Toujas-Bernaté indique que le FMI trouve normal que la Banque d'Algérie ait gardé ses positions sur les bons de Trésor américain, précisant “ne pas connaître la part des différents investissements”. Meziane Rabhi