La série d'attentats, qui a coûté la vie à plus de 72 Irakiens, intervient en pleine crise entre dirigeants politiques sunnites et chiites. L'Irak est-il vraiment cet Etat “souverain, stable, autosuffisant, avec un gouvernement représentatif qui a été élu par son peuple” que vantait le président Obama quelques jours avant le départ des derniers soldats américains ? Mercredi, en pleine heure de pointe, une quinzaine de bombes ont explosé dans onze quartiers à travers la ville, faisant au moins 72 morts et 217 blessés, selon un bilan du ministère de la Santé. Cette attaque, apparemment coordonnée, n'a “pas visé des institutions ou des postes de sécurité”, mais plutôt “des écoles, des travailleurs, l'agence anti-corruption”, a affirmé le général Qassim Atta, porte-parole de la Sécurité de Bagdad. Ces attentats, qui font craindre un retour des violences confessionnelles, sont les plus meurtriers dans le pays depuis le 15 août, quand 74 personnes avaient été tuées dans dix-sept villes. Le 27 octobre, des attentats dans une rue commerçante de Bagdad avaient fait 30 morts. Il faut ajouter à cela, la grave crise politique entre chiites et sunnites (au pouvoir sous Saddam Hussein). Le Chef du gouvernement chiite, Nouri al-Maliki, accuse le vice-président sunnite, Tarek al-Hachémi, d'avoir financé et soutenu des attentats menés par ses gardes du corps. Al-Hachémi, qui a d'abord été empêché de quitter le pays, est désormais sous le coup d'un mandat d'arrêt. Il a trouvé refuge au Kurdistan, dans le nord de l'Irak. Maliki a appelé les autorités du Kurdistan irakien à “prendre leurs responsabilités” et à remettre à la justice Hachémi, qui se trouve actuellement à Erbil, la capitale de cette région autonome. En représailles, le bloc parlementaire Iraqiya, soutenu par les sunnites, a décidé de boycotter le gouvernement. Il a aussi suspendu sa participation aux travaux du Parlement où il constitue le deuxième groupe avec 82 députés, derrière la coalition chiite de l'Alliance nationale (159 députés). Iraqiya a dénoncé la “dictature” de Nouri al-Maliki et l'un de ses membres, le vice-Premier ministre Saleh Moutlak, a traité le Premier ministre de “dictateur pire que Saddam Hussein”. Interrogé sur les raisons profondes de cette crise, Yonadam Kanna, un député chrétien, a eu cette formule : “Les anciens opprimés n'arrivent pas à croire qu'ils sont devenus les oppresseurs ; et les anciens oppresseurs n'arrivent pas à accepter qu'ils sont devenus les opprimés.” R. I./ Agences