Abou Djerra Soltani vient d'inaugurer 2012 avec le premier coup d'éclat de l'année. Son parti, le MSP, quitte l'Alliance présidentielle. Mais ce coup de force des héritiers de Nahnah ne préfigure pas pour autant d'un bouleversement politique majeur. Ainsi, après huit mois d'un ultimatum adressé au président de la République, le MSP reprend sa liberté d'une coalition gouvernementale qui n'existait que dans les photos de famille. Et après ? serions-nous tentés de dire. Tous les initiés savaient que l'Alliance présidentielle était une invention artificielle qui ne doit sa vie biologique qu'à la nécessité de donner à Bouteflika une base. Mais voilà, la base était depuis le début contre nature et c'était un miracle permanent de la maintenir en gestation en donnant l'illusion que le destin du FLN-RND-MSP était convergent. Mais, le MSP est sorti de sa léthargie en voyant souffler la vague verte dans les pays arabes. Les Frères musulmans, dont ils sont issus doctrinalement, sont en train d'écraser le paysage politique arabe et même turc. Soltani a retrouvé de la voix et même un peu d'envergure en organisant le voyage du leader islamiste tunisien, Rached El-Ghannouchi à Alger. Le message se devait être explicite. Le MSP, comme les FM égyptiens, le PJD marocain, Ennahda tunisienne ou l'AKP turc, a un avenir politique. Il a aussi un calendrier dont le point culminant devrait être les élections législatives de 2012. Pour les cadres du MSP, le parti n'a pas le droit de rater ce virage historique, et pour ce faire, il fallait sacrifier sa position de parti cogérant au gouvernement. Il fallait sortir de là. Ce qui est fait. Reste que le MSP lâche la proie pour l'ombre et se retrouve dans une situation de fragilité extrême. D'abord, une fragilité interne où cette décision a provoqué de la casse et une levée de boucliers de la part des ministres MSP, invités à quitter un gouvernement — qu'ils ne quitteront pas ! — où ils tiennent des ministères à la forte valeur ajoutée. Ensuite, une fragilité électorale, puisque les défections des militants et cadres enregistrées en faveur du dissident Menasra risquent de se poursuivre et gonfler les rangs du MSP bis. Enfin, une fragilité face à Bouteflika qui, malgré les allégeances répétées de Soltani, voit l'Alliance qui défend son programme amputée de son courant le plus poilu. Ainsi, Soltani a cédé à l'urgence, et cette décision qui semble courageuse cache davantage un état de panique interne qui se manifeste par la montée en puissance de la tendance radicale incarnée par le sniper Mokri. Et avant que le MSP n'incarne une sorte d'AKP algérien, il se peut bien qu'il paie d'abord la facture du divorce avec le système. M. B.