Vendredi dernier, à 16h, l'espace Mille et Une News, dans le cadre de sa programmation culturelle, a abrité la représentation du monologue Journal d'un fou du jeune comédien Idir Benaïbouche, d'après la nouvelle éponyme du Russe Nicolas Gogol, parue en 1835. Une scène nue, à l'exception d'une caisse en bois noir, et d'un miroir accroché au fond. Poprichtchine entre et commence à raconter sa vie. Des fragments. De prime abord, on est déconcerté du discours décousu, mais au fur et à mesure, on commence à pénétrer l'univers de ce personnage qui a prétexté la folie pour raconter son désespoir. Personnage en sueur, regard effaré, presque hagard, le comédien évolue, essaye d'accrocher le public et d'attirer son intention sur son drame. Tout y passe, la bureaucratie, les différences sociales, la misère, l'amour impossible… Il n'est pas le seul à en souffrir. À travers son vécu, ce sont toutes les personnes de modeste condition, comme lui, qui s'y reconnaîtront. Si en 1835 Gogol disséquait sa société, en 2010, année de la création de ce monodrame, et même en 2012, rien n'a changé. En fait, le comédien ouvre, à travers cette nouvelle, une fenêtre sur la réalité algérienne d'aujourd'hui qui souffre de plus en plus de ces maux. Déçu par son existence qui ne lui apporte plus la joie de vivre, il se réfugie dans la folie, s'invente son propre monde et devient le Don Quichotte du XIXe siècle, et se donne pour nouvelle cause : libérer l'Espagne, en s'imaginant dans la peau du roi Ferdinand III… La pertinence du texte (qui n'a subi aucune modification, juste une théâtralisation) est à relever. Le jeu du comédien manquait de sensibilité et de consistance. Une voix monocorde, monotone, avec un débit rapide au point de perdre le fil des évènements. Ajoutez à cela une mise en scène qui souffre d'une certaine faiblesse, d'un non-aboutissement. Toutefois, ces lacunes n'ont rien diminué du mérite du jeune Idir Benaïbouche. Il a du potentiel. La base existe, ne manque que la technique. Par ailleurs, lors du débat qui a suivi la représentation, ce jeune comédien a expliqué le choix du texte, qu'il attribue à “un coup de cœur”, constatant que la réalité d'il y a deux siècles en Russie est quasiment la même en Algérie, si ce n'est plus. Il a également fait part de ses ambitions, des blocages qu'il rencontre pour “faire tourner” son spectacle. La langue a été entre autres l'autre point sur lequel a insisté, affirmant que les productions théâtrales doivent d'abord s'adresser au public dans sa langue. Affirmant que dire qu'il n'existe de public est un constant faux. Car ce dernier est bel et bien là, attendant juste qu'on tienne compte de ses goûts. A I