Les mesures qui seront prises à l'encontre des enseignants qui ne rejoindront pas leur poste samedi s'apparentent à de la répression pure et simple. Alors que l'on s'attendait sérieusement à un dénouement du conflit dans les lycées, après les bonnes dispositions affichées, notamment par le CLA qui a accepté de tempérer ses ardeurs revendicatives, voilà que le bras de fer est de nouveau relancé. À la grande déception des élèves et de leurs parents qui n'avaient pourtant d'ouïe, hier, que pour le siège du ministère de l'Education où devait se dérouler la négociation. Cette dernière a malheureusement tourné court, en tout et pour tout, elle aura duré un quart d'heure, le temps pour les deux parties de constater qu'il y avait un gros quiproquo entre elles. En effet, le chef de cabinet des ministres pensait que la délégation du CLA, forte de quinze personnes, était venue dans le seul but de mettre son paraphe au bas du PV qui avait été transmis la veille. Pour les enseignants, le PV en question devait servir de base à l'ouverture de la négociation. “Je ne suis pas mandaté pour négocier quoi que ce soit”, a avoué Khaldi, chef de cabinet à ses interlocuteurs qui, après une ultime rencontre avec quatre d'entre eux, ont décidé de rentrer chez eux. Mais ne voilà-t-il pas, que le gouvernement, certainement irrité par la fermeté des enseignants, décide de mettre en branle la grosse artillerie répressive. Le conseil du gouvernement qui s'est réuni, hier après-midi, et après avoir écouté une communication de Aboubakr Benbouzid, décide ainsi, de trois mesures. La première est une plainte qui sera “devant les juridictions pénales contre les meneurs de cette grève illégale et sauvage pour entrave au droit constitutionnel à l'enseignement”. La deuxième portera sur “la suspension puis la radiation des PES qui n'auront pas repris les cours et qui seront ainsi déclarés en abandon de poste.” Enfin, la troisième, consistera en un recrutement au pied levé “de diplômés universitaires en remplacement des enseignants en abandon de poste qui auront été radiés”. Le communiqué du conseil du gouvernement fait porter exclusivement aux deux syndicats grévistes, qu'il ne nomme même pas d'ailleurs, la responsabilité du conflit tout, en mettant en exergue “les efforts” consentis de la part des autorités pour le règlement de la crise. “Mais force est de constater que les instigateurs de cet arrêt de cours persistent dans leur attitude, ôtant ainsi, tout alibi à leur action, lit-on dans ce communiqué qui estime qu'il s'agit bien d'une prise d'otages des élèves, de leurs parents et du pays dans des buts inavoués, mais de plus en plus évidents”. Tout en déclinant encore l'argutie de l'étiquetage politique, le gouvernement va jusqu'à dire que les enseignants eux-mêmes sont des otages. “Bon nombre d'enseignants parmi les grévistes sont eux-mêmes confrontés dans de nombreux cas au chantage et aux mêmes menaces des perturbateurs”. Le communiqué du gouvernement joue aussi sur le registre de la dramatisation, en estimant que “cette grève qui persiste depuis plusieurs semaines, et sans précédent dans le monde, constitue une grave menace sur la scolarité des élèves concernés et sur les intérêts de toute la collectivité nationale”. Il est indiscutable que la situation est grave, pour ne pas dire presque irréparable. Mais ce n'est certainement pas avec une telle escalade, de la part des autorités, que les choses peuvent rentrer dans l'ordre. De telles mesures répressives, dont on voit d'ailleurs très mal la faisabilité sur le terrain, sont de nature, à faire le lit d'un irrémédiable pourrissement. Et c'est d'autant plus incompréhensible que les deux syndicats ont accepté de mettre un bémol à leurs revendications de départ. Ils ne demandent plus l'augmentation des salaires de 100%, mais juste l'indexation de la prime de qualification sur le salaire de base, le relèvement de la prime de documentation à 2 000 DA et la conversion de la prime de rendement, distribuée tous les six mois et soumise au bon vouloir de l'administration, en prime mensuelle. Ce n'est pas la mer à boire pour le gouvernement qui sait avoir la main sur le cœur quand il s'agit d'octroyer des prêts non remboursables de 80 millions de centimes aux hauts fonctionnaires de l'Etat. N. Sebti Le Communiqué du conseil de gouvernement “Le gouvernement lance un appel aux professeurs d'enseignement secondaire grévistes, pour faire preuve d'esprit de responsabilité et reprendre les enseignements, au plus tard, le samedi 29 novembre. Il appelle aussi ceux qui ont pris la responsabilité grave de déclencher et d'entretenir cette grève à se ressaisir. Enfin, le gouvernement invite également, les parents à veiller pour que les élèves des classes secondaires se présentent à leur établissement au plus tard, le 29 novembre. Enfin, et dans le cas où la situation actuelle viendrait à perdurer, au-delà du samedi 29 novembre courant, le gouvernement décide de recourir aux mesures suivantes pour lesquelles il donne mandat au ministre de l'Education nationale. Premièrement : le dépôt de plainte devant les juridictions pénales contre les responsables et meneurs de cette grève illégale et sauvage, pour entrave au droit constitutionnel à l'enseignement. Deuxièmement : la suspension puis la radiation des PES qui n'auront pas repris les cours et qui seront ainsi déclarés en abandon de poste. Troisièmement : le recrutement de diplômés universitaires en remplacement des enseignants en abandon de poste qui auront été radiés.