La Caisse nationale d'assurance chômage (Cnac) a-t-elle épurée sa situation dans le domaine de l'activité formation-réinsertion ? La question se pose, dès lors que des cadres et agents de la direction régionale de la Cnac de Sidi Bel-Abbès, ainsi qu'un responsable du centre de formation professionnelle pour garçons de cette ville ont été impliqués dans une triste affaire de dilapidation de deniers publics, passations illégales de marchés publics, faux et usage de faux. Le verdict, rendu par le tribunal de Sidi Bel-Abbès, en janvier dernier, est le suivant : l'ancien directeur régional de la Cnac et l'ex-directeur du centre de formation ont écopé chacun d'une peine de 18 mois de prison ferme et 200 000 DA d'amende, alors que l'assistant du premier cité et un agent de la caisse ont été condamnés à 12 mois de prison ferme et 20 000 DA d'amende. Sur un autre plan, l'ancien chef de mission inspection de la Cnac, M. Z., est revenu à la charge, pour déterrer un rapport de mission qu'il a établi, il y a près de 5 années, sur demande de sa hiérarchie, suite à un travail d'inspection dans différentes directions régionales de la caisse (Saïda, Naâma, Aïn Témouchent, Tlemcen) et dont la dernière mission était consacrée à la wilaya de Sidi Bel-Abbès. Selon M. Z., le rapport de mission, transmis en 2007 à la direction générale de la Cnac, faisait déjà état de “surfacturation des fournitures d'œuvre” (ciment, sable de rivière, briques pleines, gravier, parpaing, faïence, carrelage, plinthes, interphones, fer rond et fer d'attache, etc.,) et tirait la sonnette d'alarme aussi sur “le faux et usage de faux, ainsi que sur la non-application de la loi portant code des marchés publics”. “À Aïn Témouchent, les chômeurs allocataires inscrits officiellement à la Cnac n'avaient pas bénéficié de la formation-réinsertion, parce que la fourniture d'œuvre était à la charge de la wilaya et donc du centre de formation. Cela n'intéressait pas la direction régionale de la Cnac, car il n'y avait pas de dépenses. Mais, ailleurs, les directions régionales de la caisse avaient procédé à la surfacturation des fournitures d'œuvre”, a expliqué l'ex-chef de mission. “D'autres personnes sont impliquées dans cette affaire” Ce dernier a également soutenu que “la direction régionale Cnac de Sidi Bel-Abbès était la seule à avoir dépensé près d'un milliard de centimes pour les fournitures d'œuvre, alors que dans d'autres directions régionales, les dépenses n'avaient pas dépassé les 150 millions de centimes”. M. Z. a en outre noté que pour l'affaire de Sidi Bel-Abbès, “le tribunal est arrivé aux mêmes conclusions” que celles portées dans son propre rapport d'audit. Seulement, la sentence du tribunal ne semble pas le satisfaire “à 100%”. “Je combats depuis longtemps la corruption et je ne peux pas cautionner cette injustice. En plus des 4 personnes écrouées, il y a d'autres personnes impliquées dans cette affaire, des responsables désignés comme témoins seulement”, a-t-il déclaré. Pour M. Z. “les conclusions de la police judiciaire de Sidi Bel-Abbès” sont toujours là pour confirmer ses dires. L'ancien chef de mission de la Cnac est aujourd'hui retraité et traîne une maladie chronique, le diabète, avec risque de cécité. Dans son témoignage à Liberté, M. Z. a rappelé avoir envoyé, à l'époque où il travaillait encore à la Cnac, trois demandes d'audience au ministre du Travail, en respectant la voie hiérarchique. Des demandes restées sans réponse. Selon lui, les dirigeants de la Cnac l'ont “poussé à prendre sa retraite”, après lui avoir fait subir “des pressions” et après l'avoir accusé, en conseil de discipline, de “divulgation de secret professionnel”. “Une dilapidation ou un faux et usage de faux, ça se dénonce. Je pensais vraiment qu'on allait me féliciter pour le travail demandé, mais en réalité, on voulait me licencier”, a révélé notre interlocuteur. En 2009, soit près de deux ans après son départ à la retraite, l'ancien chef de mission de la Caisse nationale d'assurance chômage est traîné devant le tribunal de Sidi M'hamed, pour diffamation, à la suite de la publication d'articles, dans la presse privée, sur le dossier Cnac de Sidi Bel-Abbès. La justice prononce le verdict suivant : 2 mois de prison avec sursis et 100 000 DA d'amende contre lui. M. Z. fait alors appel auprès de la cour d'Alger : celle-ci confirme le jugement du tribunal de Sidi M'hamed, en réduisant toutefois l'amende à 50 000 DA. L'ex-cadre de la Cnac ne baisse pas les bras et introduit un recours auprès de la Cour suprême. Le 24 novembre 2011, cette dernière confirme le jugement de la cour d'Alger. En janvier 2012, le verdict du tribunal de Sidi Bel-Abbès tombe, incriminant notamment des cadres supérieurs de la caisse. “Je n'ai pas admis, lors de l'audience au niveau du tribunal de Sidi Bel-Abbès, qu'on ne m'ait pas donné l'occasion de témoigner pleinement, alors que je suis la plaque tournante de l'enquête menée par la brigade économique et financière de cette wilaya”, a déploré M. Z. Il y a à peine un mois, ce dernier a saisi, par lettre recommandée, le président de la République, persuadé que cette fois, il sera écouté et ce, d'autant que “le président Bouteflika lui-même nous incite à dénoncer les crimes économiques”. H A