Pour maintenir le train de dépenses actuelles de l'Etat, le déficit budgétaire continuera à se creuser au fil des ans et finira par vider le Fonds de régulation des recettes avant 2020. Ce fonds où sont venus s'accumuler les surplus budgétaires depuis sa mise en place en 2003, pour atteindre plus de 4 000 milliards de dinars, fin 2012, constitue la réserve de l'Etat pour faire face aux années de “vaches maigres" et aux aléas des marchés pétroliers. En continuant à dépenser plus que ce qu'il ne collecte comme recettes fiscales, et sans changer de modèle économique ou de politique fiscale et budgétaire, l'Etat aura consommé toute cette “tirelire" dans 5 ou 6 ans. Après cela, les déficits budgétaires iront accroître la dette de l'Etat qui, de moins de 1 400 milliards de dinars en 2012 (9% du PIB), pourrait atteindre près de 3 000 milliards de dinars en 2020 (16% du PIB), puis près de 25% du PIB à l'horizon 2030. Quant aux réserves de changes (près de 200 milliards de dollars fin 2012), elles commenceront à baisser à partir de 2016 quand la croissance non contenue des importations et la baisse des exportations d'hydrocarbures nous mèneront à des déficits commerciaux structurels. Ces réserves de changes risquent de s'épuiser autour de 2024, ce qui nous obligera à nous endetter pour financer nos déficits commerciaux. La dette extérieure, que l'Etat a prudemment remboursée en quasi-totalité en 2005, pourrait alors atteindre plus de 150 milliards de dollars en 2027 et plus de $ 300 milliards autour de 2030 si les importations continuent à croître. Cette tendance nous ramènerait ainsi à des niveaux de dette extérieure non soutenables, comparables à ceux atteints au début des années 1990 et qui nous ont forcés à l'époque d'entreprendre des ajustements très douloureux sur le plan social. Ce scénario, décrit, dans le rapport Nabni Algérie 2020, de 256 pages, présenté, hier, à la salle Cosmos du complexe Riad El-Feth n'est pas une fiction. “Cette perspective peu réjouissante est malheureusement probable si rien n'est fait", si le statu quo actuel est maintenu. Ce scénario, désastreux, peut être déjoué en amorçant rapidement le virage que doit prendre notre économie et éviter ainsi le même sort que le “Titanic". Le magnifique paquebot qui avait amorcé son virage quelques minutes trop tard a coulé. Il faut impérativement couper le cordon avec la rente et la (rente) réorienter vers des investissements d'avenir. “Ne laissons pas les hydrocarbures devenir notre héroïne", avertit Raïf Mokretar Karroubi, expert en banque. En d'autres termes, il faut faire du pétrole le carburant de la diversification de l'économie. Au total, cinq ruptures fondamentales, (15 chantiers), par rapport aux politiques menées ces dernières décennies sont nécessaires comme leviers pour réaliser la vision économique de l'Algérie 2020. “Notre pays dispose d'un formidable potentiel économique et est doté d'atouts pour réussir : capital humain, infrastructures, ressources naturelles, positionnement stratégique et surtout un réservoir d'idées et d'ambitions qui n'attendent que le cadre idoine pour pouvoir se réaliser. Ce qui lui a trop longtemps manqué, c'est une vision, de l'audace et de la volonté pour entamer un Projet global et cohérent", souligne le think tank Nabni. “C'est ce que nous proposons avec espoir et réalisme", a ajouté le collectif. Cette vision fait de “Cinquante chantiers de rupture pour bâtir l'Algérie de 2020", relie dans un ensemble cohérent et indissociable, des chantiers structurants, des virages dans les politiques publiques, dans les domaines économique, social, éducatif, urbain, culturel et de santé publique, en asseyant le tout sur des réformes fondamentales de la gouvernance et des institutions de l'Etat. Si on ne change pas la gouvernance, pas de développement possible. Chacun des thèmes abordés au cours du projet Nabni 2020 met en évidence la nécessité de changements profonds dans la gouvernance publique. Les virages à prendre dans des domaines comme l'économie, l'éducation ou la santé, reposent tous sur une nouvelle manière de concevoir et de conduire les politiques publiques. Celle-ci exige une refonte de la gouvernance de l'Etat et des institutions, et plus fondamentalement de leurs liens avec les administrés. M R