Fédérer les sociétés arabo-musulmanes autour d'un projet économique serait, selon George Corm, l'alternative pour faire face au wahhabisme qui prend le dessus, même s'il reconnaît que ce n'est pas facile. Selon M. Corm, si les mouvements arabes veulent aboutir, ils doivent au moins s'interroger sur le sujet. L'analyse du politologue invité de la 18e édition du Salon international du livre d'Alger (Sila) qui portait sur le thème : "Le nouveau gouvernement du monde" (titre de son dernier ouvrage), s'est axée sur le Printemps arabe et la situation que vit la région de manière générale. Pour le conférencier, le monde arabe est gouverné par l'alliance américano-saoudo-pakistanaise. "L'Arabie saoudite a un but : semer le chaos partout pour pouvoir prendre le contrôle de la région", lance M. Corm. M. Corm estime que ce trio qui fait du wahhabisme la seule façon (dominante) d'être musulman, imposant une manière bien définie de se vêtir et faisant de nous "des martiens, en retrait du développement". Il qualifie cette idéologie de "trotskisme musulman". D'après lui, cela a été rendu possible par un certain nombre de facteurs : l'intelligentsia arabe qui s'est laissée prendre de vitesse par le wahhabisme sur tous les projets arabes, tels que les Non-Alignés ou la Ligue arabe. "Les initiatives arabes, à l'instar des Non-Alignés ou de la Ligue arabe, ne se sont jamais basées sur la religion, contrairement au wahhabisme qui a créé des alternatives à ces organisations, à l'image de la Banque islamique. Les rêves se sont fracassés et nous pouvons parler de l'enterrement provisoire du nationalisme arabe laïque", estime-t-il. M. Corm précise que cette situation profite à l'Arabie saoudite, car cela lui permettra de jouer le rôle de l'arbitre. Pour le politologue, la montée en puissance du wahhabisme est due à la politique de la rente qui arrange tout le monde. L'auteur juge que la cause des Printemps arabes est principalement cette politique de la rente et la naissance d'une catégorie de "privilégiés proches du pouvoir et profitant de cette rente". "C'est la raison de la révolte en Syrie, qui a vu le jour lorsque le président Bachar al-Assad, pour faire plaisir au Fonds monétaire international, a supprimé les subventions et autres privilèges octroyés aux agriculteurs. Car si nous nous intéressons aux révoltés, nous nous rendrons compte qu'ils sont des ruraux. La même chose s'est passée en Egypte et en Tunisie. Au Liban, nous avons dépossédé la population du centre-ville avec des prix de loyer exorbitants. Maintenant, le centre du Liban a perdu son âme et ressemble à Dubaï. Nous sommes orphelins de notre identité, chose qui favorise aussi la montée de l'islamisme", argumente-t-il. Il ajoute que "les revendications des révoltes sont le pain et la dignité, chose que l'islam prône". Mais il faut savoir aussi que "les islamistes, ce sont des néo-libéralistes". M. Corm rappelle que l'instrumentalisation de la religion a été convoquée contre Gamel Abdelnasser et financée par l'Arabie saoudite et la CIA qui appellent à faire la guerre en Afghanistan ou en Syrie et laissé la Palestine. "Pour mois, les djihadistes, ce sont des takfiristes, car ils traitent les musulmans de mécréants et appellent à leur assassinat", note-t-il. "Aujourd'hui, on nous fabrique une nouvelle religion". D. S Nom Adresse email