Si l'intention de Bouteflika, quant à sa participation à l'élection du 17 avril 2014, reste un mystère, la candidature de Benflis, elle, est une énigme. Avec sa déclaration de candidature, faite avant-hier à Alger, l'ancien chef de gouvernement, Ali Benflis, a définitivement mis le pied à l'étrier d'une élection présidentielle que d'aucuns, à l'image du premier secrétaire du Front des forces socialistes (FFS), Ahmed Betatache, ne se gardent plus de présenter comme fermée. Des appréhensions d'autant plus légitimes que le chef de l'Etat a accaparé, bien avant la grande explication, tous les leviers à même d'influer sur le déroulement et l'issue de l'élection du 17 avril prochain. En effet, depuis septembre 2013, le chef de l'Etat a tenu à placer des personnalités acquises corps et âme à sa cause à la tête des ministères (Intérieur, Justice, etc.) et institutions (Conseil constitutionnel, Cour suprême, etc.) jouant un rôle de premier plan dans les opérations électorales. Un maillage institutionnel en règle présenté par beaucoup de figures de l'opposition, notamment le groupe des 19 (15 partis de divers courants politiques et 4 personnalités), comme des signes probants d'une fraude annoncée, au point de conditionner une quelconque participation au prochain scrutin par l'installation d'une commission indépendante qui se chargera, à la place du ministère de l'Intérieur, de la gestion des opérations électorales. Paradoxalement, Ali Benflis, lui, dans son discours-programme, n'a fait aucune référence aux conditions de la tenue du prochain scrutin et encore moins exigé la mise en place d'instruments à même de garantir une compétition loyale entre les différents soupirants. Une position qui serait tout à fait défendable si le président Bouteflika avait renoncé à son ambition de rempiler. Ce qui n'est pas, pour le moment du moins, le cas et certains observateurs le donnent d'ailleurs partant, nonobstant son état de santé chancelant. Benflis fait-il aveuglément confiance aux deux commissions prévues par l'article 12 portant loi électorale pour encadrer le prochain scrutin, ou encore à la justice pour jouer pleinement leur rôle et faire barrage à toute velléité de fraude ? Invraisemblable. Il ne pourrait faire preuve d'un tel angélisme, lui qui connaît parfaitement le fonctionnement du système et des institutions de la République. Pour preuve, dans sa déclaration de candidature, l'ancien chef de gouvernement a clairement soutenu : "Le pays ne manque pas de lois, il y en a suffisamment, mais il manque de volonté politique pour les appliquer dans toute leur rigueur et leur équité." Comment alors compte-t-il contrecarrer une éventuelle fraude en faveur de Bouteflika, s'il venait à concourir, alors qu'en 2004, fort pourtant du soutien de l'ancien chef de l'état-major de l'ANP, feu Mohamed Lamari, mais aussi de pans entiers du FLN qu'il dirigeait à l'époque, il avait été broyé par la mécanique impitoyable d'un système ayant pris fait et cause pour son adversaire et, peut-être, futur rival ? Grande énigme ! Si l'on considère que Benflis ne brigue pas de mandat présidentiel pour servir de simple faire-valoir à une élection jouée d'avance, que cache alors son engagement sans conditions dans une présidentielle qui risque d'être l'exact remake des précédentes ? Aurait-il reçu des assurances que l'actuel locataire du Palais d'El-Mouradia ne sera pas de la course ? Vraisemblablement, oui. Même si Benflis et ses partisans s'en défendent énergiquement. Mais cela signifierait, aussi, que l'élection est jouée d'avance. A. C Nom Adresse email